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Communiqué de presse10 octobre 2013

Mine d’Eramet en Indonésie : un nouveau rapport alarme sur les violations des droits des communautés

Montreuil, le 10 octobre 2013 – Des chercheurs des universités de Monash, Deakin et de l'Université nationale d'Australie viennent de publier un rapport accablant sur le projet de méga-mine de nickel de Weda Bay, opéré par la multinationale française Eramet.

Fondée sur un travail de terrain, cette étude révèle notamment les expropriations forcées lors de la phase actuelle d’exploration, et alarme sur la violation du droit au consentement libre, préalable et informé des communautés indigènes vivant sur l’île d’Halmahera. Pour les Amis de la Terre France et Indonésie, ce sont de nouvelles preuves des impacts inacceptables de cette mine avant même le début de l’exploitation : ils réitèrent donc leur demande à leurs gouvernements et à Eramet d’abandonner immédiatement le projet.

Les conclusions du rapport « Accès à la justice pour les communautés affectées par la mine de nickel de PT Weda Bay » sont édifiantes et ne laissent pas la place au doute. Les auteurs expliquent notamment que « les membres des communautés qui vont perdre l’accès à leurs terres cultivables ont été soumis à des pressions et intimidations pour signer des accords avec l’entreprise », une situation qui avait déjà été révélée par la Commission Indonésienne des Droits de l’Homme (Komnas HAM).

Par ailleurs, l’étude démontre que les mécanismes internationaux, telle que la plainte qui avait été déposée auprès de la Banque mondiale, ont été inefficaces pour protéger les communautés, et garantir le respect de leurs droits, notamment celui au consentement libre, préalable et informé.

Selon Abetnego Tarigan, directeur de WALHI/Les Amis de la Terre Indonésie, « Le gouvernement indonésien doit revoir le contrat de Weda Bay Nickel en conformité avec la loi indonésienne, en excluant l’espace de vie des communautés Tobelo Dalam et Sawai de la zone de la concession, de sorte que leur droit à un environnement sain soit reconnu et protégé ».

En 2011 et 2012, au moins 6 personnes ont été criminalisées pour défendre leurs terres. Autour des zones forestières éloignées de la surveillance des médias, on assiste à une remilitarisation du territoire, avec la présence de l’unité spéciale Brimob de la police et l’armée. Ainsi, le rapport de force est complètement asymétrique : la lutte des peuples autochtones pour leurs droits à la terre et l’environnement doit faire face à l’expansion minière financée par du capital international et soutenu par le gouvernement.

Munadi Kilkoda, Président de AMAN Moluques du Nord (1) s’indigne : « L’entreprise ne devrait pas forcer les habitants à vendre leurs terres et les priver ainsi de leurs moyens de subsistance. La maigre compensation financière (2) sera totalement insuffisante pour subvenir aux besoins des générations futures, alors que les cultures des peuples autochtones ont prouvé leur habilité à gérer la forêt, la mer et la nature autour de la baie de Weda Bay, sur l’île Halmahera, de façon durable depuis des générations ».

Malgré l’accélération des expropriations, aujourd’hui environ 150 familles tentent encore de résister et refusent de céder leurs terres à Eramet. Le rapport indique que ces familles sont soumises à des pressions et menaces importantes.

Juliette Renaud, chargée de campagne sur les Industries extractives aux Amis de la Terre France conclut : « Le gouvernement français nous a assuré en juin que Weda Bay est pour lui une « priorité économique », mais la défense des intérêts des entreprises françaises ne peut pas se faire à n’importe quel prix ! S’il ne veut pas être complice des violations des droits des communautés locales, il doit retirer immédiatement tout soutien à ce projet, qui aura de plus un impact écologique considérable » (3).

Contacts presse :
Caroline Prak, Les Amis de la Terre France :
06 86 41 53 43 / 01 48 51 18 96 – caroline.prak@amisdelaterre.org

Notes :

(1) AMAN est une association qui accompagne les communautés autochtones et fait campagne avec Les Amis de la Terre Indonésie contre le projet de Weda Bay.

(2) La compensation financière est de 8000 Rupiah/mètre carré (environ 0,50 euro), un montant complètement dérisoire « à prendre ou à laisser » qui a été imposé aux communautés.

(3) Les Amis de la Terre France et Indonésie ont rencontré les cabinets des ministères du Commerce extérieur, du Redressement productif et du Développement au mois de juin 2013. Les représentants ministériels rencontrés alors avaient indiqués qu’Eramet pourrait bénéficier d’une garantie de la Coface et d’un prêt de l’AFD pour son projet minier de Weda Bay, en complément de financements sollicités notamment auprès de la Banque mondiale, la Banque asiatique de développement.

A cette occasion, Les Amis de la Terre France et Indonésie avaient interpellé la ministre Nicole Bricq au travers d’une lettre, qui est restée sans réponse encore à ce jour.

Pour en savoir plus sur la mine de nickel de Weda Bay, lire la note de synthèse des Amis de la Terre de juin 2013 « Impacts sociaux et environnementaux de la mine de nickel et de cobalt de Weda Bay en Indonésie« .