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© Marion Esnault
Climat-ÉnergieFinance
9 novembre 2017

Quand Engie tente de fuir ses responsabilités au Chili

Engie veut devenir leader mondial de la transition énergétique. L’entreprise, possédant encore des centrales à charbon à l’international, souhaite donc s’en défaire en les cédant.

Pourtant, le fait qu’une autre entreprise qu’Engie fasse tourner des centrales à charbon ne fait aucune différence pour le climat. Une entreprise “engagée pour la transition énergétique” ne peut donc pas se dédouaner de ses actifs polluants. Plongée au coeur du Chili où Engie a entamé un processus de revente de certaines de ses unités charbon …

Le secteur du charbon au Chili

Alors que le Chili a pour objectif d’atteindre respectivement 50% et 70% de renouvelables dans son mix énergétique en 2035 et 2050, le pays possède encore 27 unités charbon et une en construction, représentant 4969 MW de capacités installées. Les centrales à charbon sont concentrées dans certaines zones, notamment les communes voisines Tocopilla et Mejillones, qui accueillent environ 50% du parc charbonnier chilien.

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Le rôle d’Engie

Sur les 27 unités restantes, Engie en possède 8 et est sur le point d’en ouvrir une nouvelle en 2018. C’est donc le 2ème propriétaire de centrales après AES Gener en termes de capacités installées, avec environ 1355 MW.

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Source: Chile Sustentable, selon KAS Ingenieros, (2017)

Depuis juin 2017, Engie a mis en vente certaines de ces unités : celles de Tocopilla (au moins trois), Andina CTA et Hornitos CTH. Après 6 mois de difficultés à vendre, Engie a récemment décidé de modifier sa proposition de vente, selon des sources journalistiques chiliennes.1 Depuis, le processus s’est accéléré, la décision devrait être définitivement prise par Engie dans les deux mois à venir.

Les impacts du charbon sur les communautés locales

Les centrales à charbon d’Engie sont situées sur seulement deux communes (Tocopilla et Mejillones), où se trouvent d’autres centrales. Les habitants de ces régions sont donc fortement impactés par les activités d’Engie. Les normes de qualité de l’air y sont largement dépassées : la zone est saturée en polluants atmosphériques (particules fines, dioxyde de soufre, les oxydes d’azote, métaux lourds dont mercure, vanadium et nickel). Les centrales à charbon produisent d’importantes quantités de déchets, dont des cendres contenant des produits chimiques, tels que de la silice, de l’aluminium, du fer, du calcium et des oxydes de métaux lourds. Or, au Chili, ces cendres ne sont pas considérées comme des déchets dangereux et ne font donc pas l’objet d’un traitement spécifique. Tout cela affecte gravement la santé des populations locales ainsi que les écosystèmes.

Les centrales électriques à charbon nécessitent également de grandes quantités d’eau pour refroidir les turbines. Au Chili, compte tenu de l’emplacement des centrales sur les zones côtières, l’eau est extraite de la mer, aspirant beaucoup de zoo- et de phytoplancton marin. A cela s’ajoute le rejet dans la mer d’eaux chaudes et de produits chimiques anti-algues, après leur utilisation pour refroidir les turbines. La flore et la faune des écosystèmes marins est donc radicalement modifiée dans les zones de décharge, menaçant notamment les ressources naturelles dont les communautés de pêcheurs et des conchyliculteurs tirent leurs revenus.

La centrale de Tocopilla, une antiquité

Mises en marche il y 57 ans, les quatre unités de la centrale de Tocopilla sont les plus vieilles de tout le Chili et de fait extrêmement polluantes. Les unités U12, U13, U14 sont les trois unités les plus émettrices de CO2 par GWh d’électricité produit de l’ensemble du Chili ! Si Engie était amené à vendre cette centrale, l’entreprise serait directement responsable du prolongement de sa durée de vie …

Nos demandes

Par cohérence avec les objectifs de l’Accord de Paris, Engie, dont l’État est actionnaire à 33 %, doit fermer ses centrales à charbon au Chili au lieu de les revendre, en assurant une reconversion juste aux travailleurs, négociée avec eux et les communautés locales – la fermeture des 4 unités de la centrale de Tocopilla étant urgente.