centrale à charbon - énergies fossiles
Climat-ÉnergieFinance
28 mai 2018

Assemblées Générales des banques : le bilan 2018

À l’occasion des Assemblées générales des banques, Les Amis de la Terre ont appelé Crédit Agricole, Société Générale, Natixis et BNP Paribas à mettre un terme à leurs soutiens à l’expansion du charbon, des sables bitumineux et du gaz de schiste. Ces demandes se sont heurtées aux réponses évasives et au manque d’ambition des directions.

Les Amis de la Terre, présents aux Assemblées générales de Crédit Agricole, Société Générale, Natixis et BNP Paribas ont appelé les banques à revoir à la hausse leurs engagements climat pour mettre un point final à leurs soutiens au développement de nouvelles infrastructures de charbon, de sables bitumineux et de gaz de schiste. Puisque épuiser les réserves d’hydrocarbures actuellement en exploitation nous mènerait déjà au-delà de 2 °C de réchauffement global, il est vital de ne plus étendre la frontière des fossiles.1 Tour d’horizon de ces lacunes.

Société Générale : quelle position vis-à-vis du pétrole et du gaz ?

Alors que Société Générale est depuis quelques mois la cible d’une campagne publique dénonçant son rôle central dans le développement de projets d’exportation de gaz de schiste aux Etats-Unis,2 elle a été interrogée sur sa nouvelle politique pétrole et gaz,3 publiée en toute discrétion vendredi 18 mai.

Société Générale n’a acté aucune exclusion sur le gaz de schiste et s’embourbe dans la défense d’une industrie non seulement dramatique pour le climat, mais également très risquée financièrement. Et cela a bien été compris par toutes ses concurrentes. Au moment où Société Générale prend la place de numéro un dans l’exploration de gaz de schiste liquéfié, les autres banques réduisent leurs financements au secteur.4 Mais Société Générale n’en démord pas : “le gaz est une énergie de transition”, alors que le projet Rio Grande LNG pour lequel elle joue un rôle clé de conseil financier aura au total l’impact de 44 centrales à charbon.5

Les banques et le financement des sables bitumineux

Dans le secteur des sables bitumineux, les engagements ne sont pas au rendez-vous. Non seulement Société Générale n’exclut pas les entreprises actives dans le transport du pétrole issu des sables bitumineux, mais elle laisse aussi la porte ouverte aux financements de projets d’oléoducs. Société Générale comme Crédit Agricole – qui a réitéré lors de son AG qu’elle ne renonçait pas à financer ces mêmes entreprises 6 – continuent notamment à financer l’entreprise Kinder Morgan qui prévoit l’extension du pipeline Trans Mountain au Canada. Ces capitaux sont clés pour la réalisation du projet, puisqu’ils servent de liquidités obligatoires en cas d’accident sans lesquelles Kinder Morgan n’aurait pu obtenir les autorisations de construction. 7

BNP Paribas et son soutien au charbon en Allemagne

Les Amis de la Terre étaient accompagnés de Norbert Winzen du village de Keyenberg, un village de 1000 habitants menacé d’être détruit pour l’agrandissement par l’entreprise RWE de la mine de Garzweiler, une des plus grandes mines à ciel ouvert et de lignite de l’Union européenne. La mine qui était il y a trois ans à 30 km de son village, n’est plus qu’à 500 mètres de sa maison. 20 villages ont déjà été détruits, 30 000 vies brisées. 6 autres villages pourraient connaître le même sort. 8

Les Amis de la Terre ont interpellé BNP Paribas sur ses financements à RWE. Lucie Pinson des Amis de la Terre explique : « Des sifflements et une jolie histoire à laquelle BNP Paribas elle-même ne croit pas, c’est tout ce qu’aura obtenu Norbert Winzen de la part de la banque. RWE renforce peut-être ses positions dans les renouvelables, mais on est loin d’une réelle stratégie de transition énergétique. Plus gros producteur de lignite et pollueur de l’Union européenne, RWE refuse d’acter l’arrêt de ses projets de développement dans le charbon. On est donc face à une entreprise qui non seulement brise la vie de milliers de personnes mais joue également contre une sortie du charbon de l’Allemagne et donc de l’Union européenne, alignée avec les objectifs de l’Accord de Paris. Continuer de financer RWE, déjà exclue des soutiens d’AXA, Allianz et SCOR, est incompréhensible de la part de BNP Paribas qui entend se positionner comme leader de la lutte contre le dérèglement climatique ». 9

Les Assemblées générales ont donc été un rendez-vous manqué pour les banques. L’urgence de la crise climatique exige pourtant qu’acteurs publics comme privés revoient périodiquement leurs ambitions à la hausse pour atteindre d’ici la moitié du siècle la sortie totale des énergies fossiles. Avec la COP24 en perspective en décembre, et le Sommet de San Francisco en point d’étape en septembre, les institutions financières sont plus qu’attendues sur la fin de leurs soutiens aux nouveaux fossiles.

Notes
2

Voir le rapport des Amis de la Terre « Société Générale, plein gaz sur les fossiles » présentant les enjeux de la position pro gaz de schiste de la banque

4

Voir l’analyse du Rainforest Action Network

5

Voir l’analyse des Amis de la Terre

7

Dans cet article est détaillé le lien entre les facilités de crédit accordés par les banques françaises à l’entreprise Kinder Morgan et le projet Trans Mountain Pipeline, montrant que ces soutiens sont indispensables à la construction de cet oléoduc.