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Climat-ÉnergieFinance
6 décembre 2019

BNP Paribas : 5ème prêteur à l’expansion du charbon

De nouvelles données financières publiées par plusieurs ONG internationales révèlent le rôle de BNP Paribas dans le financement aux 258 entreprises qui prévoient de nouvelles centrales à charbon.

Entre 2017 et septembre 2019, BNP Paribas a accordé 4,3 milliards de dollars à ces entreprises, ce qui fait d’elle le 5ème plus gros prêteur au monde à ces entreprises, devant 3 banques japonaises et Citi.

Pour rappel, cela fait bientôt 5 ans que les scientifiques du GIEC, l’AIE et les agences onusiennes appellent à ne plus construire de nouvelles centrales à charbon.

258 entreprises prévoient plus de 1000 nouvelles centrales à charbon dans le monde

Face à l’urgence climatique, Crédit Agricole, AXA, Banque Postale Asset Management, CNP Assurances ont déjà annoncé qu’ils ne soutiendraient plus ces entreprises.

A l’inverse, BNP Paribas s’en est tenue à une déclaration ambiguë qui ne tient pas lieu d’un engagement strict à exclure ces entreprises. Le 22 novembre 2019, elle déclarait qu’elle “sera notamment amenée à cesser ses relations avec les producteurs qui planifieraient de nouvelles capacités de production d’électricité à base de charbon”. Quand cette exclusion sera effective et comment BNP entend définir les entreprises qui développent ? L’annonce de fin novembre laisse toute place à l’interprétation.

Or, l’enjeu est de taille : BNP Paribas est le 5ème plus gros prêteur au monde à ces entreprises, devant 3 banques japonaises et Citi. Entre 2017 et septembre 2019, elle leur a accordé 4,3 milliards de dollars. Dans les classements intégrant les prêts et les émissions d’actions et d’obligations, BNP Paribas est le 22ème plus gros financeur au monde de ces entreprises sur cette période avec 8,8 milliards de dollars de financement à ces entreprises depuis 2017.

En réponse à l’AFP, BNP Paribas déclare n’avoir de relation qu’avec une dizaine d’entreprises. Pourtant, c’est bien 22 entreprises qui apparaissent dans la recherche financière. Peut-être la raison se trouve dans l’approche étroite retenue par BNP Paribas. Comme l’attestent la politique sectorielle de la banque sur le charbon et sa déclaration de novembre, BNP Paribas ne regarde que les entreprises classées comme productrice d’électricité. Or, et la banque le sait, la moitié des entreprises qui développent de nouvelles centrales à charbon ne répond pas au profil-type de l’entreprise charbon : entreprises diversifiées, acteurs de la pétrochimie, du textile, etc., variés sont les entreprises qui pensent qu’il y a encore de bonnes affaires à faire dans le charbon.

Parmi les bénéficiaires de BNP Paribas : le sud-coréen KEPCO a qui BNP Paribas a accordé 600 millions de dollars depuis 2017. Avec 2,2 milliards de dollars de financements sur la même période, Crédit Agricole est le premier financeur de cette entreprise qui prévoit des nouvelles centrales dans 6 pays. Mais contrairement à BNP Paribas, Crédit Agricole s’est lui engagé à ne plus financer cet acteur.

Le premier bénéficiaire des financements de BNP Paribas est l’entreprise finlandaise Fortum, qui a acquis 42% du capital de Uniper en 2018 et en détient plus de 70% aujourd’hui. Uniper/Fortum entend mettre Datteln IV, une nouvelle centrale à charbon en service en 2020, en Allemagne. Cela leur vaut d’être compté parmi les développeurs de charbon. Par ailleurs, les raisons d’exclure les entreprises de tous soutiens ne manquent pas. Uniper menace de traîner le gouvernement néerlandais devant un Mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (ISDS) pour contrer la décision néerlandaise de sortir du charbon d’ici 2030. Ironie du sort, Fortum est détenue en partie par l’Etat finlandais qui lui s’est engagé à sortir du charbon d’ici 2029. Les deux pays font partie de la Powering past coal alliance.

Ainsi, l’annonce de BNP Paribas il y a deux semaines concernant son intention de réduire à zéro son exposition au charbon d’ici 2030 dans les pays de l’UE et d’ici 2040 ailleurs prend une autre teinte à la lueur de ces faits. Non seulement BNP Paribas oublie intentionnellement que les pays de l’OCDE, hors EU, où se situent plus de 20% de la capacité existante de production d’électricité à partir du charbon, doivent également sortir du charbon d’ici 2030 et non d’ici 2040. Mais il ne faut pas oublier que ces objectifs ont peu de sens si l’expansion du charbon n’est pas immédiatement stoppée.