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Multinationales
Communiqué de presse18 juin 2020

La pétrolière française Perenco mise en cause pour pollution et opacité sur ses activités en RDC

Au travers d'un recours en justice, Sherpa et les Amis de la Terre France demandent l’accès à des documents qui permettraient de prouver l’implication et le rôle décisionnel de PERENCO France dans la gestion des opérations pétrolières en RDC. L’entreprise se retrouve aujourd’hui devant la Cour d’appel de Paris face aux deux associations.

La pétrolière, détenue par la famille PERRODO, l’une des plus fortunée de France, est mise en cause pour ses activités qui auraient causé de graves dommages à l’environnement dans la province du Kongo-Central en République Démocratique du Congo (RDC). 

Le 2 août 2019 Sherpa et les Amis de la Terre France ont obtenu une première ordonnance du Tribunal de Paris les autorisant à saisir, par voie d’huissier, des documents au siège parisien de PERENCO. Mais les dirigeants de l’entreprise se sont opposés à l’exécution de la décision de justice en lui refusant l’accès à ses locaux 1.

Une nouvelle demande a alors été déposée en octobre 2019 sollicitant du juge que la mesure soit assortie d’une astreinte financière. Déboutées en première instance, les associations ont fait appel. L’audience se tiendra aujourd’hui à 14h à la Cour d’Appel de Paris.

Selon Me François de Cambiaire et Me Sébastien Mabile, avocats des associations, « les sociétés françaises qui opèrent à l’étranger peuvent être tenues responsables des dommages résultant de leurs activités. L’enjeu de ce dossier sera de confirmer la portée des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile et de rétablir l’égalité des armes face à des multinationales qui organisent leur opacité ».

Unique opérateur pétrolier présent en RDC, PERENCO est mise en cause pour des atteintes graves à l’environnement dans de nombreux rapports, enquêtes et interpellations du Sénat congolais, d’associations locales et d’ONG internationales, dans un contexte de menaces et d’arrestations arbitraires sous le régime de Joseph KABILA2.

Aucune réponse n’a été apportée par PERENCO, qui a érigé le silence en politique. Le groupe ne publie aucune information relative à ses activités, s’abrite derrière des sociétés écrans situées aux Bahamas et s’oppose à l’exécution d’une décision de justice.

PERENCO France continue dans le cadre du contentieux en cours de nier toute implication dans la supervision des activités congolaises.

« S’il n’y avait rien à trouver, pourquoi s’opposer à la saisine ? La transparence est un enjeu fondamental dans la lutte contre l’impunité des entreprises du secteur extractif, qui tirent trop souvent profit de pays victimes de malédiction des ressources. Il est temps que la lumière soit faite sur les activités de cette société française » selon Clara Gonzales, chargée de contentieux à Sherpa.

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Plus d’informations sur la procédure employée
La pratique de « discovery » dans les pays de Common law permet aux victimes d’accéder à des documents cruciaux pour leur litige en demandant aux multinationales de les produire. En France, les victimes se trouvent démunies en matière de preuves face aux grands groupes.
Pourtant, la procédure prévue par l’article 145 du code de procédure civile permet de demander au juge d’autoriser la saisie de documents qui seront utiles à la solution d’un futur litige, soit « par surprise » en recourant à la procédure d’ordonnance sur requête comme l’avaient fait Sherpa et les Amis de la Terre France initialement, soit de manière contradictoire par la voie du référé (procédure objet de l’audience aujourd’hui). Cette procédure, qui n’avait encore jamais été utilisée pour des dommages causés par un grand groupe à l’étranger, pourrait permettre de rétablir une forme d’égalité des armes.