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Communiqué de presse23 mars 2021

Les reconversions professionnelles : l’urgence écologique et la crise sanitaire obligent à un ambitieux changement d’échelle selon le CESE

Le Conseil Economique Social et Environnemental (CESE) a adopté à l’unanimité des groupes aujourd’hui, un Avis sur les reconversions professionnelles porté par la Section du travail et de l’emploi. L’Avis présente l’état des lieux, les évolutions et les dispositifs actuels autour des reconversions professionnelles.

Dans un contexte de crise économique et sociale liée au Covid, et de bouleversements numériques et technologiques, le CESE préconise un changement d’échelle dans les politiques publiques avec un postulat fort autour duquel il développe sa première préconisation : l’urgence – sociale et professionnelle – autour des reconversions est aussi écologique. Il est donc impératif de corréler les enjeux de court terme avec les enjeux de long terme.

Pour Florent Compain, porte-parole des Amis de la Terre France et co-rapporteur de l’avis au sein du CESE : « L’adoption de cet avis montre une nette évolution dans la perception des enjeux écologiques par l’ensemble des acteurs de la société civile réunis au sein du CESE. Il est un signal encourageant pour non pas subir les effets environnementaux et sociaux des crises mais au contraire les anticiper par des actions coordonnées des acteurs, cela dans une temporalité commune ».

Découvrez la version complète de l’Avis

Au total, ce sont 16 recommandations que le CESE formule. Nombreuses viennent appuyer les positions des Amis de la Terre France qui pensent de façon conjointe les luttes pour la justice sociale et pour la justice environnementale, et lient aussi les luttes locales et les luttes internationales, comme le projet de reconversion de la raffinerie de Grandpuits par Total l’a récemment illustré. Florent Compain complète : « Le plus grand enjeu en matière de reconversion professionnelle est de s’attacher en premier aux personnes et en particulier aux plus précaires, aux moins qualifiés. Ces personnes bénéficient d’un manque de formation et de reconnaissance qui les rendent plus vulnérables et les exposent à la déqualification. Or construire un socle de droits qui permettrait à tous de bénéficier d’un véritable filet de sécurité par le biais de reconversions mieux organisées est une mesure de justice sociale indéniable ».

Dans cette logique, réunir l’ensemble des travaux sur le sujet au sein d’une méta-analyse coordonnée par France Stratégie et co-construite avec l’ensemble des parties prenantes est une autre demande forte du CESE (préconisation 4). Cette mutualisation permettra aux organisations professionnelles, syndicales, associations, pouvoirs publics, de construire une véritable prospective partagée et déclinée à toutes les échelles. Ce travail permettrait également d’engager des transformations du monde économique en accord avec les objectifs climatiques afin d’anticiper les besoins de reconversion et de formation des métiers et des compétences.

Enfin, l’une des autres recommandations fortes de l’avis du CESE sur les reconversions professionnelles porte sur le dialogue social au sein des entreprises et notamment du Conseil Social et Économique (CSE), en s’appuyant sur des études d’impacts économiques et sociales liées au risque climatique qui s’intégreraient dans une nouvelle Base de Données Économique, Sociale et Environnementale (BDESE), évolution de l’actuelle BDES (préconisation 11). L’objectif ici serait de partager les évolutions souhaitables au regard des transformations en cours, et de mettre en lumière les emplois menacés pour engager des mesures d’accompagnement des personnes.

Le CESE recommande également d’engager les collectivités à promouvoir, par la commande publique, la création de nouvelles filières et de nouveaux emplois dans les métiers d’avenir, afin de soutenir les reconversions professionnelles en relation avec les objectifs de transition partagés prédéfinis (préconisation 7). Cela passe par l’intégration dans l’ensemble des contrats de marchés publics des clauses et critères environnementaux, économiques et sociaux.

Notes aux rédactions :

Les Amis de la Terre ont rejoint le CESE en 2010 à l’occasion de la réforme constitutionnelle intégrant la dimension environnementale au Conseil Economique et Social devenu le CESE.

Troisième assemblée constitutionnelle de la République après l’Assemblée nationale et le Sénat, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) favorise le dialogue entre les différentes composantes de la société civile organisée et qualifiée en assurant l’interface avec les décideuses et les décideurs politiques

Dans cet avis, le CESE préconise de :

– confier à France stratégie une mission d’étude prospective partagée des métiers et des qualifications intégrant des hypothèses volontaristes de transition écologique, co-construite avec l’ensemble des parties prenantes ;

– confier à France compétence la mise en œuvre des politiques de certification nécessaire à l’identification des compétences transversales les plus utiles dans les transitions en cours, en concertation avec les branches professionnelles ;

– harmoniser, dans une concertation entre l’Etat, les branches professionnelles et les régions, les différentes méthodes prospectives pour apprécier les futurs besoins en compétences des branches professionnelles et des territoires ;

– construire avec les branches professionnelles des engagements de l’emploi et des compétences (EDEC) en lien avec les transitions écologique, numérique et démographique ;

– demander aux collectivités d’utiliser le levier de la commande publique pour soutenir les filières d’avenir et d’intérêt général, à développer pour la transition ;

– mettre en œuvre des mesures d’accompagnement suffisantes pour les demandeurs d’emploi en vue de leur reconversion professionnelle lorsque celle-ci s’impose ;

– donner les moyens d’une reconversion aux salariés dont la formation n’a pas été actualisée, en déplafonnant le CPF ;

– ouvrir le CPF de transition aux demandeurs d’emploi dont les qualifications n’ont pas été actualisées lorsqu’ils étaient en emploi ;

– engager une réflexion sur la sécurisation des transitions professionnelles quel que soit le statut des personnes concernées et sur l’harmonisation des dispositifs, en particulier en termes de droits à la formation professionnelle ;

– investir massivement dans l’effort d’accompagnement des transitions professionnelles grâce à la mobilisation du plan d’investissement dans les compétences et des plans régionaux d’investissement dans les compétences ;

– encourager le dialogue social dans toutes les entreprises, y compris les TPE PME, pour mettre en place une gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences donnant accès au dispositif « transition collective » ;

– à défaut d’accord d’entreprises, ouvrir le dispositif « transition collective » aux entreprises relevant d’un accord de GPEC territoriale ou de GPEC de branche ;

– prévoir une évaluation du dispositif transition collective, sur les critères de la variété des publics volontaires et de la durée des temps de formation ;

– renforcer le dialogue social dans les CSE en réalisant des études d’impact économique et social liés aux risques climatiques et en transformant la base de données économiques et sociales (BDES) en BDESE par l’ajout d’une dimension environnementale ;

– informer, par une grande campagne de communication, sur le droit au conseil en évolution professionnelle et faire financer les bilans de compétence par le CPF de transition professionnelle ;

– assurer aux indépendants l’accès au CPF, avec des moyens renforcés, pour accompagner leurs reconversions professionnelles ;

– ouvrir le dispositif de transitions collectives aux indépendants, qui souhaiteraient se reconvertir vers le salariat.