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Climat-ÉnergieFinance
Communiqué de presse26 novembre 2018

Rapport : trois ans après la COP21, les banques françaises financent toujours plus de charbon

Le lundi 26 novembre, à Montreuil – Dans une note publiée ce matin, Les Amis de la Terre appellent les banques françaises à revoir immédiatement leurs politiques charbon, pour une exclusion ferme des entreprises qui développent de nouveaux projets dans ce secteur. L’ONG dénonce la faiblesse des engagements actuels de BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole et Natixis, qui depuis 2016 ont accordés plus de 10 milliards d’euros de financements à ces entreprises qui parient ouvertement contre le respect de l’Accord de Paris sur le climat, soit une augmentation de 52% par rapport aux trois années qui ont précédé la COP21.

Alors que la finance mondiale se réunit à partir d’aujourd’hui à Paris dans l’objectif affiché de construire un système financier durable, la note “COP21 + 3, les banques françaises toujours au charbon” publiée ce matin par Les Amis de la Terre France [1] révèle que les banques françaises soutiennent toujours la construction de nouvelles centrales à charbon en finançant massivement les entreprises qui portent ces projets.

La capacité mondiale de production d’électricité à partir de charbon a augmenté de 92 GW depuis l’adoption de l’Accord de Paris en 2015 et 1380 projets sont encore prévus aujourd’hui dans le monde [2]. D’après de nouvelles données financières [3], BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale et Natixis ont accordé depuis la COP21 plus de 10 milliards d’euros de financements aux 120 entreprises les plus agressives en matière de construction de nouvelles centrales à charbon [4]. C’est 52% de plus que les 6,7 milliards d’euros accordés pendant les trois années précédant la COP21.

La faute aux politiques sectorielles des banques qui n’excluent de manière stricte que les financements de projets et ont au contraire des critères très faibles sur les financements d’entreprises. BNP Paribas, qui comptabilise près de 4 milliards d’euros de prêts et d’émissions d’actions et d’obligations aux 120 entreprises, a ainsi pris des mesures nettement insuffisantes pour restreindre directement ses soutiens aux entreprises très actives dans le secteur ou qui prévoient d’augmenter leur capacité charbon.

Lucie Pinson, référente de la campagne Finance privée des Amis de la Terre France, explique :

“Les banques françaises refusent d’exclure un certain nombre d’entreprises au motif de les accompagner dans leurs efforts pour la transition énergétique. Nous disons que cela ne doit valoir que pour les entreprises qui s’efforcent réellement de se transformer en vue de s’aligner avec une trajectoire 1,5°C. Celles qui construisent délibérément des projets charbon que les plus hautes autorités scientifiques et politiques ont qualifiés à de multiples reprises de strictement incompatibles avec l’Accord de Paris doivent immédiatement être mises au ban. Refuser de le faire, c’est se porter responsable du développement du secteur le plus émetteur de CO2 et signer dès maintenant l’échec des objectifs climatiques adoptés en 2015 par la communauté internationale”.

Si les financements de projets ont toujours représenté moins de 10% des financements au secteur du charbon, la part des financements d’entreprises dans la construction de nouvelles centrales est amenée à croître du fait des risques réputationnels énormes associés au charbon. C’est notamment le cas en Europe où 66 projets sont toujours prévus, alors que tous les efforts devraient être tournés vers la fermeture avant 2030 des 275 centrales à charbon en opération [5].

Lorette Philippot, chargée de campagne Finance privée aux Amis de la Terre France explique :

“Avec respectivement 1,8 milliard et 1 milliard d’euros de financements aux développeurs européens de nouvelles centrales à charbon depuis la COP21, BNP Paribas et Société Générale sont les 3ème et 10ème banques internationales à soutenir le plus les entreprises qui bloquent l’Europe dans sa transition énergétique. Parmi leurs clients figurent l’allemand RWE et le tchèque CEZ dont les activités charbon à 500 kilomètres de Paris ou de Katowice où se tiendra la COP24, menacent notre climat, notre santé et même des villages entiers de destruction. Le rapport du GIEC sur les conséquences d’un réchauffement à 1,5°C a démontré qu’il nous fallait accélérer la sortie des énergies fossiles. Il est criminel de continuer de financer les entreprises du charbon, mais aussi des sables bitumineux et des gaz de schiste comme le font Crédit Agricole et Société Générale”.

La note publiée quelques jours avant le Climate Finance Day et la COP24 appelle les banques à revoir leurs politiques. Les banques françaises doivent s’engager à aligner leurs activités avec une trajectoire + 1,5 °C, exclure immédiatement les entreprises qui étendent leurs activités dans le secteur du charbon ou y sont fortement actives ou exposées, et conditionner leurs soutiens aux autres entreprises à l’adoption d’ici 2020 d’un plan détaillé de fermeture de leurs infrastructures charbon.

Chiffres clés :

  • Plus de 1380 projets de centrales à charbon sont encore prévus dans le monde, dont 66 en Europe ; si elles sont construites, elles augmenteraient la capacité installée globale de plus de 33%.
  • 120 entreprises particulièrement agressives dans le développement de nouvelles centrales à charbon représentent 68% du pipeline mondial de nouvelles centrales à charbon et constituent la Coal Plant Developers List (CPDL).
  • BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole et Natixis, ont augmenté leurs financements aux 120 développeurs de charbon depuis la COP21 et l’adoption de leurs engagements charbon, passant de 6,7 milliards d’euros entre 2013 et 2015 à 10,25 milliards d’euros entre 2016 et 2018.
  • BNP Paribas comptabilise près de 4 milliards d’euros de prêts et d’émissions d’actions et d’obligations à ces entreprises depuis la COP21.
  • Si Crédit Agricole finance majoritairement des entreprises asiatiques, BNP Paribas et Société Générale financent les développeurs de charbon européen, avec respectivement 1,8 milliard et 1 milliard d’euros de financements.
  • BNP Paribas et Société Générale financent les entreprises qui développent leurs mines et centrales à charbon au sein même de l’Europe et bloquent ouvertement la sortie du charbon sur le continent, comme les Allemandes RWE et Uniper, ou la Tchèque CEZ.

Oxfam France a publié samedi un rapport “Banques françaises, les fossiles raflent la mise” sur les financements des banques françaises à l’ensemble des énergies fossiles, charbon, pétrole et gaz, ainsi qu’aux énergies renouvelables. Disponible en ligne.

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