Les organisations de l’Alliance écologique et sociale rassemblées devant la Direction des services Départementaux de l’Education Nationale de l’Essonne © Rémy El Sibaïe / Greenpeace
Les organisations de l’Alliance écologique et sociale rassemblées devant la Direction des services Départementaux de l’Education Nationale de l’Essonne © Rémy El Sibaïe / Greenpeace
Climat-Énergie
5 novembre 2025

Une vi(ll)e sans gaz fossile : elles le font !

Plusieurs villes françaises ont commencé à mettre en œuvre des politiques de sobriété, de rénovation et de remplacement des chauffages au gaz fossile. De la commune rurale à la capitale, tour d’horizon des villes qui se bougent – et des bénéfices qui en résultent !

Faire de la sobriété notre meilleure alliée

Lors du pic de la crise énergétique en 2022, en lien avec l’invasion russe de l’Ukraine, le discours politique et médiatique s’est concentré sur la baisse de la température de chauffage. Mesure essentielle et efficace, elle n’est pourtant qu’une action possible parmi de nombreuses autres.

Comprendre les usages, sensibiliser les usager·es aux écogestes et optimiser les installations en fonction des usages sont aussi des leviers essentiels pour réduire la consommation énergétique. Les communes gèrent de nombreux bâtiments : hôtel de ville, piscine, bibliothèque, salle des fêtes… Et d’autres locaux mis à disposition d’associations. Or, elles n’ont pas toujours une bonne visibilité de l’usage réel des infrastructures. Une personne en charge de la sobriété à Hendaye explique par exemple que la simple prise de contact avec les associations a été un grand levier d’économies d’énergie : la ville s’est rendu compte que les horaires de chauffage dépassaient celles d’usages, ou que la température de l’eau dans les vestiaires du gymnase était trop élevée1.

Hendaye a ainsi réduit en moyenne de 16,7 % la consommation énergétique des quatorze bâtiments qu’elle a mobilisés dans le cadre du concours « Cube » (Climat usage bâtiment énergie). En cumulé, avec les douze autres villes participant au concours en 2024, la baisse des consommations par les seules actions de sensibilisation des usager·es et optimisation technique a permis un gain de 561 000 euros.

Tous les bâtiments publics peuvent réduire leur consommation énergétique, y compris ceux de la santé : ainsi, le CHU de Montpellier avait déjà réduit sa consommation énergétique globale de 43 % entre 2010 et 2022, et a mis en place de nouvelles actions pour répondre à la crise énergétique engendrée par la reprise économique post-Covid et la guerre en Ukraine. Après avoir conduit des audits énergétiques sur l’ensemble de ses sites, le CHU a optimisé ses système de chauffage et de ventilation, par exemple grâce à des programmations horaires, tout en contrôlant les températures pour s’assurer du confort thermique du personnel et des patient·es. La période de chauffe a ainsi pu être reculée de trois semaines pour la période hivernale de 20222 !

À Montpellier, ville pionnière en matière d’économies d’énergie, les actions entreprises depuis plusieurs décennies ont permis de diviser par deux la facture énergétique. L’économie cumulée de 45 millions d’euros a permis de réaliser 5 groupes scolaires, 5 crèches et 4 gymnases3. Ces économies ont pu être réalisées grâce à la sobriété, mais aussi la rénovation thermique.

Rénover les établissements publics

Une fois le levier de la sobriété mis en œuvre, c’est au tour de l’efficacité énergétique de s’activer : répondre au même besoin, en consommant moins d’énergie. Pour cela, la rénovation complète des bâtiments est incontournable.

La commune de Malaunay, proche de Rouen, l’a bien compris. Constatant la part croissante de l’énergie dans son budget communal, cette ville de 6200 habitant·es a mis en œuvre dès 2006 un vaste programme d’économies d’énergie et un programme de rénovation en 2012. Mairie, gymnase, piscine, écoles, logements sociaux… L’ensemble de son patrimoine bâti, soit une vingtaine de bâtiments et une surface totale avoisinant 17 500 m², ont été rénovés.

Une politique bénéfique sur de nombreux plans : les émissions de CO2 de l’énergie ont été divisées par plus de deux depuis 2006, et la ville a généré 35 % d’économies d’énergie. Les économies sont estimées à 27 000€ par an4. Autant d’argent qui peut être utilisé pour améliorer la qualité de vie : par exemple, cette somme équivaut aux dépenses de fonctionnement de l’école de musique et de la bibliothèque municipale5. Selon la chambre régionale des comptes de Normandie, le vaste programme de rénovations a même permis à la commune d’échapper aux effets de la flambée des prix de l’énergie de 2021-2022. À l’issue d’une décennie de rénovations énergétiques (2014-2023), le chauffage des bâtiments au gaz est désormais accessoire et ne concerne plus que la mairie et la cantine de l’école Brassens6.

À Muttersholtz (2000 habitant·es) en Alsace, l’école communale et la mairie ont aussi été mises aux normes BBC (bâtiment basse consommation). Le nouveau gymnase, coiffé de 600 m2 de panneaux solaires, produit même plus d’énergie qu’il n’en consomme7 !

Les écoles : des bâtiments à rénover en priorité

38 % des écoles et trois quart des collèges sont chauffés au gaz fossile8. Alors que le bâti scolaire représente 157 millions de m² soit 30 % du patrimoine immobilier public9, c’est un parc à rénover en priorité.

En effet, plus de la moitié des bâtiments scolaires ont une performance énergétique classée de D à G. Ces passoires thermiques pèsent lourd dans le budget des communes. Selon le baromètre de la rénovation des écoles, en 2030, la facture énergétique des collectivités liée au patrimoine scolaire pourrait être réduite de 10 % par an10.

En plus des économies, la rénovation des bâtiments scolaires vétustes permettrait de meilleures conditions d’apprentissage pour les élèves, et réduirait les problème de santé liés à la pollution intérieure.

Les écoles primaires Jules Verne et la maternelle Claude Debussy de la ville de Caudan en Bretagne ont obtenu des résultats impressionnants : réduction de 51 % de la consommation énergétique, de 60 % de la consommation de chauffage, ainsi que des économies de 49 % sur les factures et une diminution de 57 % des émissions de gaz à effet de serre !11.

Aller plus loin

Développer les alternatives au chauffage fossile

Une fois la consommation réduite grâce à des efforts de sobriété et des politiques de rénovation, une politique de réduction de la dépendance au gaz doit permettre de remplacer les systèmes de chauffage au gaz fossile par des systèmes de chauffages durables et performants, tels que les pompes à chaleur, les réseaux de chaleur alimentés de façon soutenable, le solaire ou la géothermie.

À Paris par exemple, la chaleur produite dans les égouts par les eaux usées des toilettes, douches, lave-vaisselles… est récupérée et injectée dans les réseaux de chaleur de la ville. Par exemple, l’installation des échangeurs thermiques nécessaires a permis de satisfaire 60 % du chauffage nécessaire pour cinq bâtiments publics dans le 10ème arrondissement (un collège, deux écoles, un gymnase et une piscine)12. Faciliter le raccordement des établissements publics aux réseaux de chauffage et de froid urbains fait partie des priorités du plan climat de la capitale pour sortir des énergies fossiles d’ici 2040 pour tous les équipements publics13.

La ville compte aussi développer 6000 micro-installations de production d’énergies renouvelables sur les bâtiments publics à horizon 2050 et continuer d’accompagner l’essor des énergies renouvelables et de récupération locales, pour atteindre un part de 20 % de la consommation locale14. D’autres communes plus petites peuvent viser une plus grande autonomie. À Malaunay, 13 sites produisent de l’électricité et 19 sites, raccordés à une boucle d’autoconsommation collective, consomment cette production. La production annuelle représente déjà 30 % des besoins globaux des services municipaux en électricité15.

À Besançon, le développement de la géothermie autour de la place Granvelle a permis de répondre à 50 % des besoins en chauffage de trois bâtiments gérés par la ville16. Grâce à l’extraction de la chaleur de l’eau de la nappe phréatique, 490 000 kWh de gaz sont désormais économisés17, ce qui permet également de climatiser ces bâtiments en été.

Se libérer du gaz fossile, c’est possible !

Hendaye, Montpellier, Malaunay, Muttersholtz, Paris… Des villes de toute taille ont entamé la sortie du gaz fossile. Alors que la politique énergétique nationale est défaillante, le niveau communal dispose de plusieurs leviers clés pour accélérer concrètement la transformation du système énergétique. Des programmes d’accompagnement et d’aides financières existent, alors, qu’attend votre commune pour s’y mettre ?

Notes
3

« Maîtriser l’énergie », site de la ville de Montpellier.

4

535000€ sur 20 ans. Chambre régionale des comptes Normandie, Rapport sur la Commune de Malaunay, Janvier 2025.

5

Budget 2023 de la commune de Malaunay.

8

Sénat, Rapport d’information, Le bâti scolaire à l’épreuve de la transition écologique, 2023, p.41.

9

Banque des territoires, Baromètre de la rénovation des écoles, 7 octobre 2025.

10

Banque des territoires, Baromètre de la rénovation des écoles, 7 octobre 2025.

13

Ville de Paris, « Le nouveau Plan Climat de Paris », 18 novembre 2024.