10012022-ConfPresse_NonAmazon-13
Groupe localLes Amis de la Terre Côte d'Or14 janvier 2022

Nouveau collectif Plus Jamais Ça ! en réaction à l’arrivée d’Amazon en Côte d’Or

À compter du lundi 10 janvier 2022, de nombreuses associations, dont les Amis de la Terre Côte d'Or, ainsi que divers syndicats et collectifs locaux se sont unis sous la bannière Plus Jamais Ça ! face à la multinationale américaine Amazon, qui ouvre très prochainement une agence de livraison de proximité dans la métropole dijonnaise.

Le contexte

Révoltés, début novembre 2021, à l’annonce dans la presse locale régionale de l’implantation prochaine du géant du e-commerce américain Amazon sur le territoire cote-dorien – installation préparée dans le plus grand secret avec la complicité d’élus locaux de Dijon Métropole et de la ville de Longvic (sud-est de Dijon) via une société-écran (lire par ailleurs) – les Amis de la Terre Côte d’Or et nos partenaires locaux ATTAC 21, Greenpeace Dijon, les Ami-es des Jardins de l’Engrenage ou encore Oxfam Dijon, nous avons entrepris tous ensemble de réagir et de chercher des modes d’actions coordonnées pour empêcher, freiner, dénoncer et/ou entraver cette arrivée malvenue.

Pour rappel, le 25 novembre, nous avons d’abord cosigné et publié une lettre ouverte à M. François Rebsamen (PS), maire de Dijon et président de Dijon Métropole, et M. José Almeida (PS), maire de Longvic, où Amazon va installer son entrepôt dit « du dernier kilomètre » – ironique sachant que le territoire couvert peut atteindre plusieurs centaines de kilomètres carrés -, afin de protester contre ce choix anti-écologique et destructeur d’emplois, tout en rappelant la multitude de travers et de pratiques honteuses de ce champion mondial du e-commerce (qui est certes loin d’être unique…) à ces décideurs politiques hypocrites ainsi qu’à nos concitoyen·ne·s peu informés.

10012022-ConfPresse_NonAmazon-02

La conférence de presse

10012022-ConfPresse_NonAmazon-07
Des informations sourcées et fiables, nous en avions énormément à distribuer lors de notre conférence de presse commune devant l’immense entrepôt dont les travaux s’achèveront en février 2022 (la date d’inauguration reste pour l’heure inconnue). Ayant convié la plupart des médias locaux et régionaux lundi 10 janvier, à 11 h 30, à constater l’ampleur des désastres à venir et entendre les revendications de notre nouveau collectif Plus Jamais Ça !, les représentant·e·s de chaque organisme – dont plusieurs membres des Amis de la Terre Côte d’Or – ont tour à tour déroulé les contre-arguments à la communication léchée d’Amazon France pour justifier son implantation en banlieue dijonnaise.

Si les syndicats UD-CGT 21, Solidaires 21 et FSU 21 se sont attelés à démontrer les conditions de travail usantes, précaires et non protégées dans les entrepôts (en s’appuyant sur les témoignages de collègues travaillant dans un méga-entrepôt Amazon à Chalon-sur-Saône et d’études de terrain), les membres d’ATTAC 21 ont quant à eux dénoncé le bilan commercial des créations d’emplois promises par la firme, résultant statistiquement sur des suppressions de postes bien plus qualitatifs dans le commerce traditionnel (en moyenne de 1,9 à 6 emplois détruits pour 1 emploi créé, selon le rapport d’ATTAC et une note gouvernementale révélée en 2017). Les porte-paroles d’Oxfam Dijon ont, quant à eux, rappelé l’ampleur de l’évasion fiscale pratiquée par le géant du e-commerce, via des activités déclarées uniquement au Luxembourg, et les demi-vérités matraquées par communiqués de presse et/ou bilan annuel d’Amazon France qui prétend « payer sa part » en s’acquittant de 600 millions d’euros d’impôts en 2020 (un montant qui ne correspond en réalité qu’aux cotisations patronales et salariales et aux impôts locaux, mais pas à l’impôt sur les sociétés ni sur les bénéfices).

Enfin, sur le volet environnemental, incluant la pollution, le greenwashing et le gaspillage de ressources, il y avait tant à dire que chez les Amis de la Terre Côte d’Or, Greenpeace Dijon et XR Dijon, nous avons coordonné nos prises de parole et réponses directes aux journalistes présents. Morceaux choisis :

  • « Dans la balance de ce contrat inéquitable, nous avons : d’un côté, la promesse de 50 embauches en CDI et environ – notez l’imprécision – 250 collaborateurs externes, l’obtention espérée d’une certification environnementale douteuse du site d’exploitation et une hypothétique gestion durable des livraisons de proximité, même si le fameux « dernier kilomètre » sera multiplié par cent selon les destinataires… De l’autre, des espaces naturels et paysagers fragiles à proximité immédiate de cet entrepôt, tels que le Parc de la Colombière et ses allées arborées classés ou la trame verte et bleue de l’Ouche et du Canal de Bourgogne, qui est l’un des seuls corridors de biodiversité continus de la métropole. Ces écosystèmes urbains sont menacés à court terme par une aggravation de la pollution atmosphérique et hydraulique, puisque la végétation actuelle ne pourra pas compenser les émissions de gaz à effets de serre de centaines de véhicules de livraison journaliers supplémentaires. Quant aux infrastructures routières du secteur, à la charge des communes, elles se dégraderont plus vite et engendreront des coûts financiers mais aussi de matières premières plus importants à moyen terme. »

  • « Parlons du greenwashing ! Au lieu d’investir dans l’abandon de ses activités les plus polluantes, Amazon veut procéder à l’achat d’une certification environnementale du label britannique BREEAM. Cette future acquisition devrait couronner l’entrepôt d’une mention « Very Good » avec le moindre investissement. Les avantages de cette certification sont une apparence de vérité. D’une part parce que le label BREEAM ne fait qu’évaluer la performance environnementale des bâtiments. D’autre part, parce que le niveau de la certification qu’espère obtenir Amazon met moins l’accent sur la résilience au changement climatique, la valeur sociale et les principes de l’économie circulaire (la réutilisation, le recyclage). »
  • « En matière d’écologie, Amazon Logistics prétend faire des efforts considérables et espère atteindre la neutralité carbone d’ici 2040 en passant au tout électrique et en plantant des arbres, principalement. Ici même, les 5000 m² d’anciens entrepôts qui ont doublé pour passer à 11000 m², auront une toiture végétalisée; il y aura des panneaux solaires sur 30% de sa surface et des bornes électriques pour les voitures des employés. En revanche, le fait que des dizaines de camions et autres véhicules à moteur thermique entrent et sortent d’ici chaque jour pour sillonner les rues de la métropole et les centaines de kilomètres de routes du département ne sont pas du tout estimés. À Paris par exemple, France Stratégie et l’université Gustave Eiffel estiment que le dernier kilomètre représente 15 % du trafic et contribue à 20 % des émissions de CO2 et à 30 % des NOx (oxydes d’azote). »
  • « Et quid des millions de produits, fabriqués pour la grande majorité en Asie dont on estime pas les émissions liées à la fabrication, qui vont occasionner des allers-retours incessants en cas de panne, de casse, d’obsolescence, de changement d’avis de l’acheteur, etc. ? La production de déchets à emballages plastiques non biodégradables va donc inonder notre territoire sans parler du gaspillage de ressources, tant énergétiques que de matières premières. Comment pouvons nous être rassuré·e·s alors qu’Amazon est connu pour détruire et mettre au rebut ses produits retournés, même neufs, plutôt que les reconditionner et/ou les envoyer sur d’autres marchés – en dépit de l’interdiction de mettre au rebut les produits non alimentaires invendus visant à limiter les déchets ? »
  • « Selon une étude sérieuse de 2018, environ 24% du volume mobilisé dans les transports mondiaux serait composé de « vide », mais cette proportion grimperait à 43 % rien que pour le e-commerce d’après une étude distincte. En d’autres termes, l’équivalent de 2 des 4,6 milliards de colis commandés, chaque année, par les seuls internautes européens, sont remplis… d’air. »
10012022-ConfPresse_NonAmazon-12

Dans le plus grand secret, une habitude récurrente…

L’arrivée d’Amazon Logistics à Longvic (8, rue du 19 mars 1962) n’a été officialisée par communiqué de presse que le 3 novembre 2021 alors que l’autorisation de s’implanter avait déjà été délivrée depuis le mois d’avril 2021. Comme la marque au sourire narquois en a l’habitude, elle a fait appel à une société-écran, la SOREMI Longvic, pour acquérir et réhabiliter le site d’exploitation choisi, une friche industrielle qui abritait jusqu’en 2019 une usine de fabrication de mâts d’éolienne nommée Francéole. Lorsque cette dernière a été placée en liquidation judiciaire, à cause de la perte d’un gros client qui représentait environ 60% de son chiffre d’affaires annuel, aucun plan de reprise ni accompagnement des pouvoirs publics ont été mis en œuvre, laissant sur le carreau 61 salariés. Le terrain alors laissé à l’abandon par le propriétaire (un fonds d’investissement néerlandais) et par les collectivités locales représentait, de ce fait, une opportunité pour la multinationale de e-commerce et de livraisons Amazon, qui étend de plus en plus son emprise sur le territoire national et européen. Il ne lui a pas fallu déployer beaucoup d’arguments auprès des élus de la métropole dijonnaise qui lui ont déroulé le tapis rouge : la promesse de 50 CDI et environ 200 emplois supplémentaires chez des partenaires logistiques (lesquels ? comment ? qu’importent les précisions ?) et la garantie (promis, juré) de payer les taxes liées à leur activité locale (autrement dit, l’évasion fiscale a encore de beaux jours devant elle !), comme en témoigne cet entretien accordé par le maire François Rebsamen à ses administré·e·s par le truchement d’un Facebook Live, le 15 décembre 2021.

Nos objectifs

Contre cette machine de guerre que constituent le service de communication d’Amazon France, extrêmement bien rodée pour déployer ses éléments de langage promotionnels et ses contre-feux face à toute attaque légitime, et certains soutiens de poids parmi les hommes et femmes politiques ou médiatiques de notre région, nous avons dû nous adapter en rassemblant de nombreuses forces d’opposition engagées au niveau local (avec l’appui de nos fédérations nationales respectives).

  1. Premier constat collectif : aucun recours administratif ou juridique n’est désormais possible contre l’implantation d’Amazon sur le site industriel défini précédemment. Qu’à cela ne tienne, en formant un groupe Plus Jamais Ça ! avec ATTAC 21, Oxfam Dijon, Greenpeace Dijon, les Ami-es des Jardins de l’Engrenage, Solidaires 21, l’UD-CGT 21, l’Assemblée Populaire, Nature & Progrès Bourgogne, la CNT 21, Extinction Rebellion Dijon, la LDH Dijon, la FSU 21, Vigilance OGM 21, et bien d’autres associations et citoyen·ne·s concerné·e·s, Amazon et ses complices politico-économiques auront bien du mal à développer une activité pérenne dans le secteur et seront constamment dans nos radars…
  2. Deuxième constat collectif : cette multinationale est loin d’être la seule entreprise peu vertueuse qui aggrave les dérives du système capitaliste actuelles, mais elle cristallise justement tous les griefs énoncés depuis des années, tant dans les domaines du commerce mondial, de l’emploi, de la consommation de masse et de la surproduction que dans les domaines de l’environnement, de l’urgence climatique, des inégalités sociales, de l’évasion fiscale, des énergies, des dangers du numérique, etc. Raison de plus pour relancer tous ensemble les propositions du plan de rupture Plus Jamais Ça ! en les adaptant aux solutions disponibles ou à mettre en place sur notre territoire.
  3. Enfin, troisième constat collectif : à quoi bon lutter contre le déploiement des géants du e-commerce si les consommateurs continuent à utiliser leurs plateformes sans se poser de questions ? C’est donc un objectif supplémentaire de notre collectif nouvellement formé qui apparait là : informer nos concitoyen·ne·s, éduquer les partenaires politico-économiques, proposer des alternatives concrètes pour se passer de ces places de marché virtuelles aux dégâts bien trop réels, notamment grâce à une plateforme vertueuse des acteurs et actrices locaux·ales écoresponsables et des ateliers d’échanges et de débats au sein d’une université populaire, par exemples.