Lorette Philippot, chargée de campagne aux Amis de la Terre France, explique : « Il y a un an, la direction du Crédit Agricole déclarait qu’elle comptait tenir ses engagements vis-à-vis de Total et Mozambique LNG, allant jusqu’à dire que c’était une question de ‘rigueur morale’ 3. Depuis, les risques pour les droits humains, sur lesquels nous alertons depuis des années la banque, se sont traduits dans de multiples enquêtes accablantes pour Total. Les preuves s’accumulent et pointent à la responsabilité de Total, qui a soutenu pendant des années des forces de sécurité publiques accusées de crimes terribles et répétés contre les civils. Il est désormais intenable pour Crédit Agricole et son nouveau Directeur général de continuer à accorder une confiance aveugle à Total. Nous les appelons à faire preuve d’une véritable rigueur morale, et de refuser de soutenir la relance du projet Mozambique LNG ».

Plusieurs enquêtes de médias – Politico 4, Le Monde 5, SourceMaterial 6 – ont en effet révélé au cours des derniers mois une série d’exactions présumées, qui auraient été commises sur le site du projet Mozambique LNG de Total en 2021, par des forces de sécurité publique payées par Total et affirmant être en charge de la protection de ses installations gazières. Le Monde a par ailleurs démontré que Total savait, dès 2021, que ces soldats étaient accusés de violenter, d’enlever et de tuer des civils. Par ailleurs, une information judiciaire vient d’être ouverte en France contre Total pour homicide involontaire et non-assistance à personne en danger, suite à une plainte pénale déposée par des survivants et des familles de victimes de l’attaque de Palma – ville voisine du projet Mozambique LNG – par des groupes insurgés en mars 2021 7. Total est notamment accusée d’avoir refusé de fournir du carburant aux hélicoptères de la société de sécurité privée qui tentait de sauver des vies lors de ce massacre qui a fait plus de 1 400 victimes 8.

Les activistes dénoncent par ailleurs les conséquences irréversibles du projet de Total sur le climat, développé dans l’une des régions déjà les plus vulnérables et durement touchées par les catastrophes climatiques. Alors qu’aucun nouveau projet d’énergies fossiles ne doit voir le jour, l’exploitation des immenses réserves gazières associées à Mozambique LNG représente à elle seule une menace majeure pour le climat global. Au cours de son cycle de vie, Mozambique LNG contribuerait à produire entre 3,3 et 4,5 milliards de tonnes d’équivalent CO2 – soit plus que les émissions de gaz à effet de serre annuelles de l’ensemble des 27 pays de l’Union européenne.

Léa Zaïdat, porte-parole d’Action Justice Climat Paris, poursuit : « Mozambique LNG est suspendu depuis quatre ans, et nous savons aujourd’hui que Total met tout en œuvre pour convaincre les financeurs du projet de soutenir sa relance, qu’elle souhaite imminente. Deux gouvernements d’extrême droite ont déjà donné leur feu vert à Patrick Pouyanné, sans même s’encombrer d’une réévaluation des impacts du méga-projet : les États-Unis de Trump 9 et l’Italie de Meloni 10. Au regard de la gravité des allégations de crimes contre les civils et alors que la priorité doit être la justice pour les victimes, Crédit Agricole doit refuser de suivre aveuglément Total et ces gouvernements, qui démontrent chaque jour n’avoir que faire des droits humains et du climat. »

Face à cette réponse lacunaire et irresponsable, les deux organisations restent mobilisées pour obtenir un retrait de Crédit Agricole de Mozambique LNG et la fin de ses soutiens à l’expansion des énergies fossiles. Elles appellent par ailleurs la banque à soutenir de toute urgence l’ouverture d’une enquête internationale véritablement indépendante sur les crimes présumés perpétrés contre les civils par les forces de sécurité publiques agissant au service de Total, dans le but d’identifier les responsables, et de garantir la vérité et la justice pour les victimes. Elles seront également présentes à l’AG de Société Générale le 20 mai.