éolienne - énergies renouvelables
Groupe localLes Amis de la Terre Côte d'Or11 janvier 2024

Contribution à l’enquête publique sur l’évolution du parc éolien à ANTHEUIL et SAINT-JEAN-DE-BOEUF

Notre contribution à l'enquête publique sur la demande d'autorisation environnementale pour la construction et l'exploitation d'un parc éolien comportant 13 aérogénérateurs et 8 structures de livraison à ANTHEUIL et SAINT-JEAN-DE-BOEUF

A l’attention des membres de la commission d’enquête publique sur la demande d’autorisation environnementale présentée par la société CEPE « GRANDS COMMUNAUX », en vue d’obtenir du Préfet de la Côte d’Or l’autorisation d’exploiter une installation de production d’énergie électrique à partir de l’énergie mécanique du vent, sur les communes d’Antheuil et de Saint-Jean-de-Bœuf (21) :

Madame Chantal DUBREUIL Madame Josette CHOUET-LEFRANC Monsieur Gilles GIACOMEL Monsieur Guy BORNOT

A l’attention du Préfet de Côte-d’Or, Monsieur Franck ROBINE, et ses services instructeurs,

Créée en 2012, notre association, les Amis de la Terre Côte-d’Or est agréée au titre de la protection de l’environnement depuis 2019.

Notre association est bien évidemment très favorable au développement des énergies renouvelables (ENR), de la sobriété et de l’efficacité énergétique. Jusqu’alors nous n’avions pas émis d’avis sur des projets de parcs éoliens. Par la présente, nous sommes obligés d’émettre un avis défavorable car les ENR doivent s’inscrire dans une logique de développement durable et dans le principe de précaution inscrit dans la Constitution. Ils doivent s’inscrire dans le respect des directives européennes Oiseaux (1979) et Habitats Faune Flore (1992), désormais anciennes, et plus ancien encore, en respect des espèces protégées réglementairement selon le code de l’environnement depuis la loi de protection de la nature de 1976.

La perte de la biodiversité et le dérèglement climatique sont indissociables. Le développement d’énergies dites bas-carbone doit prendre en compte ces deux dimensions.

A l’examen du dossier, des avis défavorables émis par le CNPN, l’autorité environnementale et également les services instructeurs, dont nous rejoignons les éléments de fond, ajoutés à cela les avis très négatifs de la communauté d’agglomérations Beaune Côte & Sud, animatrice des sites Natura 2000 concernés, ainsi que la LPO, association reconnue pour ses compétences naturalistes, nous sommes donc dans l’obligation d’émettre un avis des plus défavorable.

Sans répéter stricto sensu leurs arguments, très bien développés et non partisans (ces structures n’ont pas la réputation d’être anti-éoliennes), nous développons ci-dessous des arguments supplémentaires.

Enfin, nous serions surpris que Monsieur le préfet (représentant de l’Etat en Côte-d’Or) contredise les experts des administrations locales, de l’intercommunalité et associations naturalistes reconnues, par une décision favorable à ce projet.

Le plus raisonnable est de refuser de donner suite à ce projet. Cela a été le cas récemment à Neuvy-Grandchamp, cf. article

Si ce projet en plein cœur de site Natura 2000 devait être autorisé, nous nous réserverions le droit, en tant qu’association agréée protection de l’environnement, de porter une information auprès de la commission européenne, voire un recours devant la Cour de justice de l’Union Européenne.

En vous adressant nos sincères salutations, ******************************************************************
Arguments supplémentaires :
Défaut de localisation, défaut de justification, notamment :

  • Implanter un parc éolien en extension d’un parc présent paraît logique, mais il faut reconnaître que le parc préexistant n’était pas doté d’une étude d’impact poussée lors de sa conception et de son autorisation.
  • Implanter une extension de parc éolien dans un territoire peu habité, sans grande consommation électrique, dans un territoire déjà doté de parcs éoliens, de forêts générant de l’énergie-bois et d’espaces bientôt largement dotés de parcs photovoltaïques nous interroge.
  • Le réseau Natura 2000 couvre moins de 15 % du territoire régional; y concentrer des parcs éoliens alors qu’une bonne part des espèces ayant justifié la désignation sont des espèces volantes (cf. les formulaires de données des sites Natura 2000 accessible sur le site internet du Muséum d’histoire naturelle, institution reconnue elle aussi) et sensibles à l’éolien (oiseaux de haut vol, chauves-souris, cf. aussi les espèces citées par la LPO et la communauté d’agglomérations Beaune Côte & Sud) aurait dû conduire à évitement de ce territoire et non à privilégier des mesures de réduction d’impact en phase d’exploitation.
  • Comme le souligne le CNPN dans son avis du 19 janvier 2023, l’explicitation de recherche d’autres sites de production ailleurs que dans cette ZPS est quasi absente et le mémoire en réponse du porteur de projet aura été obligé d’être plus explicite (cf. pages 11 à 25 du mémoire en réponse à l’avis du CNPN). Mais tout l’argumentaire est trompeur, il se base sur la taille de la zone d’implantation initiale, or le projet a été réduit de moitié et beaucoup de « poches » à plus faibles enjeux persistent, non analysées. La figure 17 en page 25 est parlante : le projet se situe dans l’une des 3 grandes ZPS du département. Dans une zone de sensibilité de niveau 3 sur une échelle croissante d’enjeux de 4 selon une carte de l’ancien schéma régional éolien. Il en va de même de la carte 7 en page 16 du mémoire, où l’on voit assez aisément que le projet réduit de moitié rentre en de nombreux autres lieux. Sans parler de tromperie intellectuelle, il faut reconnaître tout de même une analyse pour partie tronquée.

Défaut d’études appropriées, notamment :

  • Les périmètres d’études sont très vastes, il faut le reconnaître, et les protocoles d’inventaire semblent solides, mais il est manifeste que les rayons d’exclusion des parcs à proximité des sites de nidification d’espèces sensibles tels que décrits dans une étude de l’EPOB en 2015, validée par le Conseil scientifique régional du patrimoine naturel de Bourgogne, auraient dû conduire l’opérateur à prendre des rayons d’études nettement plus élevés : jusqu’à un rayon de 10 km s’agissant de l’espèce phare Circaète Jean-le-Blanc (unique aigle présent en Bourgogne et en voie de raréfaction). Il suffit de reprendre le tableau présenté en page 5 du mémoire de la communauté d’agglomérations Beaune Côte & Sud du 5 décembre 2023.
  • Dans son mémoire en réponse à l’avis du CNPN, le porteur de projet évoque qu’il respecte les normes courantes d’aires d’études, notamment celles édictées par la DREAL BFC ou DREAL PACA, or l’enjeu de conservation d’espèces comme le Circaète Jean-le-Blanc, aux effectifs particulièrement réduits se situe à l’échelle de l’ensemble de la ZPS. Outre d’être une question de bon sens, il s’agit de pouvoir mesurer la perte d’habitat pour cet oiseau rarissime à l’échelle de toute la ZPS.
  • Les effets cumulés avec les ligne hautes-tensions traversant la ZPS ne sont pas analysés (sauf erreur) ; l’analyse des effets cumulés avec les parcs au sein de la ZPS existants sont inexistants, notamment dans l’analyse des variantes (notamment chapitre 8.4.1 du l’Etude d’impact faune – flore – habitats.

Défaut de mesures de réduction et compensation des effets, notamment :

  • Le porteur de projet annonce des mesures de réduction nombreuses, notamment à base de technologies nouvelles mais pour certaines déjà reconnues, néanmoins ces mesures ne peuvent assurer un bridage rapide en phase d’exploitation par grand vent, le délai de réponse pour stopper une pâle avoisinant plus de 100 à 200 km/heure est bien supérieur à la durée de vol des oiseaux grands voiliers détectés (Faucons, Circaètes, etc.). Le risque reste élevé. Comme l’évoque la LPO, les outils comme le Dtbird restent encore à garantir dans leur efficacité. L’étude d’impact évoque à peine ce point.
  • Il n’est pas fait état des mesures de bridages employées sur les parcs existants et les résultats de suivi de mortalité de ces parcs.
  • La demande de dérogation oublie des espèces à forts enjeux. Elle porte sur une liste réduite d’espèces comme le souligne la LPO dans son courrier à Monsieur le préfet du 8 janvier 2024. Celle-ci gomme les principales espèces d’intérêt communautaires et le recours éventuel auprès de la Cour de justice de l’Union Européenne, pour défaut de prise en compte de Natura 2000 aboutirait assurément à un jugement en ce sens.
  • Les impacts étant jugés non significatifs par le porteur de projet, il propose des mesures d’accompagnement, en particulier pour le Circaète. Positif dans l’esprit, cette mesure est particulièrement floue et renvoie à l’action de la structure animatrice Natura 2000 de la ZPS et notamment aux services de l’État en charge de la veille sur les incidences au titre de Natura 2000. De fait cette structure animatrice, la communauté d’agglomérations Beaune Côte & Sud, ne peut que préconiser l’évitement (absence de projet) et non cautionner une mesure d’accompagnement qui intersecte sa propre politique de garantie de la pérennité des espèces visées par la Directive Oiseaux.
  • Les bridages proposés pour les chauves-souris sont jugés trop faibles par le CNPN. Et dans son mémoire en réponse, le porteur de projet répond en faisant référence à des données d’impacts issues d’études générales, de statistiques. Ici, il y a deux sites reconnus en ZSC (directive Habitats Faune Flore) et d’autres cavités, avec une forte activité des chiroptères. La LPO évoque les faiblesses des mesures prises en se référant aux recommandation d’EUROBATS. Des espèces étant d’intérêt communautaire, l’information auprès de la commission européenne pourrait être un moyen de construire une jurisprudence pour juger de la qualité des mesures, mais ce au détriment des paysages et des espèces.