Groupe localLes Amis de la Terre Paris14 novembre 2006

Contribution des Amis de la Terre au Plan Climat de Paris

Le changement climatique d’origine humaine constitue une des menaces les plus graves à laquelle l’humanité va devoir faire face. Après une période de débats, le consensus scientifique quant à la réalité du changement climatique d’origine humaine est maintenant solidement établi. […]

Le changement climatique d’origine humaine constitue une des menaces les plus graves à laquelle l’humanité va devoir faire face.
Après une période de débats, le consensus scientifique quant à la réalité du changement climatique d’origine humaine est maintenant solidement établi.
Il est admis aujourd’hui que le changement climatique aura des impacts écologiques et sociaux majeurs, mais également un coût économique extrêmement élevé.

_Pour préserver le climat et la planète, il est impératif de diviser par 4 nos émissions de GES d’ici 2050. Pour réaliser cet objectif, il est indispensable de mettre en œuvre, de toute urgence, une politique volontariste et ambitieuse. A défaut, les mesures nécessaires s’imposeront dans quelques années de façon brutale et traumatisante, et il sera peut-être trop tard.

En France, les deux sources majeures d’émissions de gaz à effet de serre (GES) sont les transports (routiers, autoroutiers et aériens) de personnes et de marchandises d’une part et le secteur de l’immobilier (habitat, tertiaire, bâtiments publics) d’autre part.
A Paris comme ailleurs, ces deux secteurs doivent donc concentrer les efforts les plus importants, car ce sont ceux qui offrent le plus fort potentiel de réduction. Mais d’autres domaines doivent être réorganisés pour atteindre l’objectif recherché : consommation, production d’énergie, gestion des déchets, organisation de l’activité économique, …

L’élaboration d’un plan climat pour Paris constitue une prise de conscience importante et aura sans nul doute, un effet d’exemplarité et d’entraînement.

C’est pourquoi les Amis de la Terre souhaitent joindre leur expérience et leur force de proposition à ce travail collectif et démocratique, espérant qu’il aboutira à de réels engagements et réalisations. Pour nous et les générations futures.

Nos propositions d’actions concrètes concernent 5 domaines :

1 – Transports de personnes et de marchandises
2 – Bâtiment
3 – Aménagement Urbain
4 – Consommation, Déchets
5 – Sensibilisation, Formation

Domaine 1
TRANSPORTS
Le secteur des transports émet de plus en plus de gaz carbonique et selon l’ADEME (agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), sa part, qui absorbe 85% de l’augmentation annuelle des émissions en France, pourrait représenter 27 % des émissions françaises en 2010, contre 22 % en 1990. C’est l’une des sources majeures de gaz à effet de serre en France.

Ce secteur, malgré tous les progrès techniques et les quelques mesures fiscales restées mineures, est de plus en plus polluant du fait d’une croissance continue du trafic, du nombre des marchandises transportées et de la distance des déplacements. Il est donc nécessaire de changer nos comportements : privilégier l’usage des transports en commun en ville, favoriser les déplacements à vélo et à pied, préférer les achats de produits locaux et de saison afin de limiter les transports de marchandises.

Dans ce domaine, la Ville de Paris est partie intégrante de la région parisienne. Elle doit donc construire une politique cohérente de développement des transports en commun avec ses partenaires de l’agglomération parisienne.

TRANSPORTS DE PERSONNES

Faciliter la marche à pied et le vélo
– Développement des quartiers verts (Circulation résidentielle à vitesse limitée, espace piétonnier plus important)
– Aménagements adaptés aux piétons et aux personnes à mobilité réduite
– Développement d’un « réseau vert » (Réseau de voies réservées aux piétons, cyclistes, et transports en commun)
– Développement d’un réseau de pistes cyclables

Améliorer les transports en commun
– Prolongement du réseau en banlieue et développement du réseau banlieue / banlieue
– Fréquence, confort, régularité, signalisation, information et rapidité
– Développement d’un réseau de bus en site propre et des tramways, véritables métros de surface
– Accès aux Personnes à Mobilité Réduite et poussettes
– Mise en place de Plans de Déplacements d’Entreprises (PDE), dont administrations

Limiter les nuisances de la voiture
– Freiner le trafic de transit dans les quartiers
– Instaurer un péage sur les autoroutes urbaines pour financer les transports en commun et réduire les pollutions
– Favoriser les véhicules les moins polluants, dans les flottes publiques et celle des taxis, et favoriser la circulation de ces véhicules les jours de pollution
– Mettre en place des restrictions de circulation graduées en fonction des niveaux de pollution Inclure dans le salon de l’automobile une partie sur les transports en commun
– Fermer à la circulation hors transports en commun renforcés, tous les lieux de promenade les week-ends (particulièrement les bois parisiens et les quais)
Réduire l’offre de stationnement
– Diminuer le stationnement sur voirie
– Travailler avec les communes de banlieue pour développer les parcs-relais près des stations et gares en couplant les tarifs avec la carte orange.
– Aucune obligation de construction de nouveaux parkings dans les immeubles d’habitation et restriction de l’offre dans les immeubles de bureaux
– Favoriser le stationnement hors voirie : accès aux places de stationnement souterraines non utilisées (type bailleur social) et parcs publics avec tarif adapté

TRANSPORTS DE MARCHANDISES

Réorienter le transport de fret
– Favoriser la livraison de fret par rail et voie d’eau jusqu’à Paris intra-muros. Le transport par voie ferrée et voie navigable devra être systématiquement étudié et privilégié pour les marchandises, matériaux et déchets.
– Interdire le trafic de transit des poids lourds au sein de l’Ile de France

Créer une ou plusieurs plateformes multimodales
– Aménager une ou plusieurs plateformes mettant à profit l’utilisation de la voie d’eau et du rail, en partenariat avec les communes de la région

Développer les livraisons à domicile
– Favoriser la livraison des courses et des objets encombrants par les magasins à domicile ou dans des points relais

Favoriser le commerce de produits locaux
– Valoriser et préférer les achats de produits locaux : agricoles, industriels ou artisanaux, par exemple pour l’alimentaire dans les cantines scolaires et cantines publiques.
– Dans le cadre des appels d’offres réalisés par la Ville de Paris, intégrer des critères de sélection sur l’impact des transports des produits à approvisionner.

Domaine 2
BATIMENT
Les premiers Certificats de Performance Energétique des bâtiments (logements, bureaux, commerces, équipements publics ou privés) ont été lancés le 1er novembre, ce qui est un pas en avant. Mais le secteur du bâtiment représente toujours 25% des émissions de gaz à effet de serre (chauffage urbain et production d’électricité compris) et 45% des consommations d’énergie finale, soit environ 2 tonnes de CO2 par habitant et par an.

Les taux de renouvellement moyen annuel du parc immobilier sont très faibles. Pour atteindre l’objectif de « facteur 4 » il est nécessaire de passer de 400Kwh/m²/an en moyenne à 100, dont 50 pour le chauffage et 37 pour l’eau chaude sanitaire (ECS) sur l’ensemble du parc. Il est donc nécessaire de réduire davantage la consommation énergétique dans les constructions neuves.

Par ailleurs, de nombreux propriétaires et locataires modestes subissent l’augmentation importante des prix de l’énergie (dans l’année écoulée : +22% pour le fuel et +11% pour le gaz. Source : INSEE), à laquelle ils sont d’autant plus exposés que leurs logements sont mal isolés. Des mesures ambitieuses pour la rénovation énergétique des bâtiments doivent être prises de toute urgence, d’autant que ce domaine permet des créations d’emplois et un investissement économique gagnant. Les économies sont réelles à dix ou quinze ans.

Les projets urbains répondants à ces objectifs seront mis en valeur pour démontrer leur faisabilité, leurs mérites, et susciter un effet d’entraînement et de levier. En particulier, les projets des EcoZAC de la place de Rungis et des Batignolles devront être soutenus et valorisés dans le cadre de ce plan.

Réduction des besoins en énergie
– Pour les logements en construction, concevoir des logements à faibles besoins en énergie (ex : lumière naturelle, inertie, ventilation avec préchauffage de l’air neuf, équipements économes…)
– Pour les logements existants, mettre à disposition et développer un service de diagnostic, d’aide pratique et technique pour réduire la consommation d’énergie à confort équivalent (type Espace Info Energie)
– Utiliser les éclairages « basse consommation » (type LED), dans les lieux et bâtiments publics, sur la voirie et espaces publics, et la favoriser au sein des entreprises de la capitale

Favoriser l’efficacité énergétique des bâtiments
– Susciter la rénovation thermique de tous les logements afin de ramener leur consommation d’énergie primaire à 50 kWh/m²/an : isolation, ventilation, système de chauffage et d’eau chaude sanitaire, …notamment en proposant avec les partenaires financiers (Caisse des dépôts, banques privées, Crédit Municipal) des prêts bonifiés à taux très réduit pour des travaux de rénovation à la norme de 50Kwh/m2/an.
– Rénover les bâtiments publics, ainsi que les logements dépendants de bailleurs publics et / ou sociaux et conditionner les financements publics de la ville pour la construction, de bâtiments, équipements publics et habitat social au respect de la performance énergétique de 50Kwh/m2/an.
– Renforcer les exigences thermiques dans toutes les constructions neuves
– Informer les citoyens des instruments financiers permettant de financer ces travaux
– Travailler avec les Architectes des Bâtiments de France pour prendre en compte la nécessité d’adaptation du bâti ancien de Paris tout en le protégeant Planifier le changement
– Etablir rapidement un plan de transformation du bâti parisien (habitat, commerces, bureaux, équipements) daté et chiffré précisément, pour les dix années à venir, et le respecter.
– Intégrer des obligations d’efficacité énergétique dans tous les documents d’urbanisme, notamment en terme d’isolation, de type de chauffage, de ventilation avec technique de climatisation naturelle de l’air en fonction des saisons
– Interdire l’installation de climatisations utilisant des gaz à effet de serre, notamment lors de la délivrance de Permis de Construire

Favoriser la production d’énergie renouvelable
– Lors de la construction et/ou de la rénovation de bâtiments publics, ainsi que d’ensembles de logements sociaux, réaliser des ouvrages permettant de produire la quantité d’énergie nécessaire a minima aux parties communes (panneaux solaires, géothermie quand cela est possible).
– Utiliser un fournisseur d’énergie renouvelable (type Enercoop) pour l’alimentation des bâtiments publics, ensembles de logements sociaux dépendants de la ville et l’éclairage des espaces et voies publiques

Domaine 3
AMENAGEMENT URBAIN
Aucun effort sur les transports et les bâtiments ne pourra pallier les déséquilibres urbains. Il faut donc tendre vers une organisation urbaine structurée et solidaire. Une répartition équilibrée de l’habitat, des équipements culturels, administratifs, sportifs et commerciaux, très facilement accessibles en transport en commun, sont complémentaires d’une efficacité énergétique des bâtiments et de moyens de transports moins polluants.

Préserver l’équilibre emploi, habitat, équipements publics, commerces et loisirs
– Favoriser le commerce et les équipements de proximité dans tout Paris
– Rééquilibrer les pôles d’emplois, en gelant notamment toute construction de nouveaux bureaux à l’ouest de Paris

Développer l’accessibilité en transports en commun de tous les équipements et pôles structurants (administrations, lieux de promenades, centres de loisirs…)

Développer les espaces verts, la végétation « captant » le CO2
– Protéger les espaces verts existants, notamment le respect absolu des bois de Boulogne et de Vincennes
– Proposer de nouvelles possibilités de végétalisation : murs, dalles, terrasses, toits, ce qui permet par ailleurs de valoriser de grandes surfaces et d’augmenter dans certains cas l’isolation thermique des bâtiments

CONSOMMATION – DECHETS

L’incinération des ordures ménagères a un impact important sur le climat et produit des résidus dangereux. La priorité est donc de réduire au maximum les déchets en reconsidérant notre consommation. L’information est ici primordiale.

Prévention, communication
– Opérations partenariales avec les commerçants, par exemple pour mettre en avant les produits les moins emballés, ou les produits issus du recyclage, ou pour ne plus proposer de sacs à la caisse …
– Information sur les différentes caractéristiques des emballages et leurs poids respectifs dans le traitement des ordures ménagères (coût financier et environnemental).
– Campagnes de sensibilisation répétées visant à un changement profond de mentalité qui valorise le durable et la qualité
– Réduction des espaces de publicité dans les lieux publics

Deuxième vie des produits
– Ouverture de nouvelles déchetteries plus accessibles aux Parisiens non motorisés,
– Compostage et méthanisation des matières organiques (parcs et jardins, cantines publiques) avec récupération de l’énergie
– Développement de nouveaux emplois dans le domaine de la réparation / retouche / récupération, notamment en soutenant les structures d’insertion liées à ces activités et les centres d’aide par le travail (CAT)

Incinérateur
– L’incinération des déchets ménagers est source de pollution, d’émission de gaz à effet de serre, et d’une efficacité énergétique peu satisfaisante pour nombreuses installations. Il convient donc de se désengager progressivement de cette filière et de privilégier la prévention.

SENSIBILISATION FORMATION
La réussite de ce Plan Climat et de la réduction effective de la consommation des gaz à effet de serre dans Paris et sa région, n’est possible qu’avec l’adhésion de la population. Celle-ci ne peut être obtenue que grâce à des campagnes de communications et d’explications répétées pour obtenir une mobilisation grandissante.

Sensibilisation
-Campagne d’information régulière et renouvelée, dans tous les domaines responsables du réchauffement de l’atmosphère : transports, chauffage, économie d’énergie, choix de consommation, réduction des déchets.
– définir un indicateur de suivi, permettant de mesurer les résultats et de communiquer sur les évolutions. Travail avec les filières professionnelles les plus concernées
– Elaboration, avec les centres de formation professionnelle, de programmes de formations initiales et continues, sur les économies d’énergie, et l’isolation, l’usage de système de chauffage et d’eau chaude sanitaire performante et sans nuisances, les énergies renouvelables utilisables en ville, et les systèmes naturels de ventilation et de climatisation.