Hambach - RWE - charbon - Allemagne
Climat-ÉnergieFinance
26 octobre 2018

AXA et BNP Paribas derrière le charbon allemand

Alors que plusieurs milliers d’activistes participeront demain à une action de masse dans la mine de lignite de Hambach de l’entreprise RWE en Allemagne, de nouvelles données financières révèlent que BNP Paribas et AXA ont augmenté leurs soutiens à l’entreprise depuis l’adoption de leurs politiques sur le secteur du charbon.

Le « leadership climatique » de BNP Paribas et Axa vole en éclat. Ils ne pourront le gagner qu’en excluant immédiatement RWE, le géant du charbon en Allemagne.  Les  deux banques doivent exclure de tous leurs soutiens cette entreprise et pallier aux lacunes de leurs politiques charbon. À défaut, ils peuvent s’attendre à être ciblés dès ce week-end et jusqu’à la COP24 comme complices de l’expansion du charbon en Europe et au-delà.

BNP Paribas a accordé 995 millions de dollars de financements à RWE depuis la COP21

Elle est ainsi la troisième banque au monde, derrière Deutsche Bank et Goldman Sachs, à avoir le plus financé l’énergéticien allemand entre janvier 2016 et septembre 2018. Sur la même période, AXA a pour sa part investi 56,7 millions de dollars dans RWE, dont 29 millions depuis l’annonce de son désinvestissement du charbon en décembre 2017.1

Ces chiffres, révélés par une recherche financière menée par le cabinet néerlandais Profundo, interpellent Lorette Philippot des Amis de la Terre : « Premier producteur de lignite dans le monde, premier producteur d’électricité à partir de charbon et premier pollueur de l’Union européenne… La liste des preuves à charge contre RWE est longue. 2 Et le désastre humain et écologique qu’elle orchestre pour l’expansion de ses mines de lignite à ciel ouvert de Hambach et Garzweiler ne la rend que plus infréquentable. À quoi les politiques charbon de BNP Paribas et AXA peuvent-elles bien leur servir, si ce n’est pas à les garder à bonne distance d’une telle entreprise ? ».

Contrairement à d’autres banques comme Natixis ou ABN Amro, BNP Paribas n’exclut automatiquement ni les entreprises très exposées au charbon ni celles qui prévoient de nouveaux projets dans ce secteur. 3 Quant à AXA, l’investisseur a bien adopté deux critères d’exclusion qui mettent logiquement RWE sur liste rouge, mais le fait qu’il ait acheté de nouvelles actions et obligations de RWE en 2018 souligne un problème de cohérence dans l’application de ses engagements. 4 De plus, à l’opposé d’autres assureurs comme Zurich et Swiss Re, AXA n’a exclu aucune entreprise de ses soutiens en assurance et ne limite que très faiblement ses couvertures aux projets charbon existants. 5

En septembre l’allemand DekaBank appelait publiquement RWE à « renoncer à son image publique de “pariah du charbon” », et le fonds de pension norvégien Storebrand déclarait en début de semaine que « les actions de RWE sont empoisonnées par le charbon ». 6 À l’inverse, BNP Paribas défendait son soutien à l’entreprise lors de son Assemblée générale de mai dernier en affirmant que RWE suit un processus de transition. 7 Et en réponse à un récent courrier 8, AXA rappelait ses engagements de décembre 2017, éludant la question du comportement de RWE à Hambach. 9

« BNP Paribas et AXA ont un mois pour agir et retrouver un semblant de crédibilité climatique d’ici la COP24 qui se déroulera en Pologne, coeur battant du charbon en Europe. Il ne saurait y avoir de compromis avec des entreprises aussi irresponsables que RWE après l’alerte sans équivoque lancée par les scientifiques du GIEC sur la gravité d’un réchauffement à 1,5°C et l’urgence à agir. AXA et BNP Paribas doivent immédiatement exclure de tout soutien RWE et les entreprises qui augmentent leur capacité charbon et ne se mettent pas en ordre de marche pour sortir complètement du charbon d’ici 2030 dans les pays européens et de l’OCDE et d’ici 2040 dans le reste du monde », poursuit Lucie Pinson des Amis de la Terre.

L’action de masse qui devraient réunir à Hambach demain plusieurs milliers de militants venus de toute l’Europe est un symbole de l’opposition aux industriels des énergies fossiles et de l’appel au désinvestissement. Les acteurs financiers français ne seront pas épargnés par cette mobilisation. 10

Echanges entre Axa et les Amis de la Terre

Notes
1

D’après une recherche Profundo pour les Amis de la Terre et leurs partenaires.

2

« 10 raisons de couper les ponts avec RWE” sur le blog de Lucie Pinson sur Alternatives économiques.

3

La politique de BNP Paribas exclut les entreprises qui ne se diversifient pas en réduisant pas la part de charbon dans leur mix de production d’électricité. Ainsi, bien que RWE prévoit d’agrandir certaines mines de lignites, de construire une nouvelle centrale, et n’a pas de plan de sortie du charbon d’ici 2030, comme requis pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, le fait que l’entreprise ait acheté des actifs dans les renouvelables suffit à faire diminuer, de manière relative et non en absolue, la part de charbon.

4

AXA s’est engagé à désinvestir et à ne plus investir dans les entreprises qui produisent plus de 30% de leur électricité à partir du charbon et qui produisent plus de 20 millions de tonnes de charbon par an, deux critères qui couvrent RWE. Plusieurs raisons peuvent expliquer les nouveaux investissements dans RWE, il peut s’agir d’investissements réalisés pour des tiers, ou de manière passive, ou refléter l’absence d’application des engagements pris.

5

Si AXA s’est engagé à ne plus assurer des projets existants de centrales et mines à charbon mais, sa politique ne couvre que les couvertures d’actif unique (« stand alone insurance ») qui sont rares pour les projets existants. Ces derniers sont assurés par des couvertures de plusieurs actifs. Or, la politique d’AXA n’exclut ce type de contrat que lorsque le charbon en représente plus de 50%.

10

Les militants présents à Hambach interpelleront BNP Paribas et AXA au cours de l’action de masse. Nous contacter si vous souhaitez recevoir les photos.