sécheresse canicule
Climat-Énergie
17 juillet 2023

Canicules, sécheresses et incendies : la nouvelle norme estivale ?

Alors que pour le gouvernement, l’urgence est de dissoudre un mouvement écologiste et de mettre en pause les réglementations environnementales européennes, le climat est devenu hors de contrôle.

Le dérèglement climatique, principalement dû à la combustion des énergies fossiles, nous mène vers un monde où les étés hors normes et rythmés par des vagues de chaleur, sécheresses et incendies deviennent la norme.

L’été, synonyme d’événements climatiques extrêmes

2022 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée en France. Alors que l’été 2023 commence tout juste, les températures de 2023 sont à nouveau largement au-dessus des normes. Le 6 juillet 2023, le record de température mondiale a été battu pour le 4ème jour d’affilée.

Ces vagues de chaleur s’accélèrent. Avant 1989, on observait une vague de chaleur tous les 5 ans environ. Depuis 2010, on en compte près de deux par an.

Et ce n’est pas une surprise. Les scientifiques, et en premier lieu les rédacteur·ices du GIEC, alertent sur ces risques dans leurs rapports successifs depuis des années.

La montée des températures, conjuguée à la raréfaction de l’eau, s’installe comme règle et non plus comme exception. À la sécheresse estivale de 2022 a succédé une inédite sécheresse hivernale en 2023 : les réserves d’eau sont durablement affectées. Alors que l’été commence tout juste, les nappes phréatiques sont déjà presque vides dans 14 départements. D’après un rapport du Bureau de Recherches Géologiques et Minières, plus de 68% des nappes sont à des niveaux inférieurs aux normales de saison (contre 58% l’année dernière) et 20% ont même un niveau « très bas ». Quatre villages des Pyrénées-Orientales ont déjà été privés d’eau potable à la sortie de l’hiver à cause d’importantes sécheresses en cours. À ce jour, plus de 40 départements font l’objet de mesures régulières de restrictions d’eau et quinze d’entre eux connaissent des situations de crise.

Ce cycle dévastateur de sécheresse caniculaire et de feux de forêts s’accompagne aussi de pluies diluviennes, comme celles qui ont inondé Saragosse, il y a quelques jours.

Ces évènements climatiques extrêmes sont directement liés au dérèglement climatique, lui même alimenté par la dépendance de notre système économique capitaliste et mondialisé aux énergies fossiles. C’est pourquoi aux Amis de la Terre, nos campagnes luttent contre le développement de nouvelles infrastructures fossiles et œuvrent pour la transition vers un système énergétique et économique à la fois soutenable et juste.

Des impacts inégalement répartis

Production d’électricité (notamment nucléaire) perturbée, destruction de la faune et de la flore, risques économiques ou pour la santé publique : les chaleurs extrêmes, la sécheresse et les incendies ont des impacts colossaux et encore difficiles à chiffrer.

Avec la multiplication des sécheresses et des canicules, la question de la gestion et de la répartition des ressources essentielles (aussi appelées biens communs) doit se poser, entre besoins essentiels pour toutes et tous et usages superficiels d’une minorité. Au cours de l’été 2022, l’approvisionnement en eau potable a connu de fortes tensions dans plus de 2000 communes. Sept d’entre elles ont même connu une interruption totale de service pendant au moins plusieurs jours en métropole. Mais tout le monde ne semble pas logé à la même enseigne.

De fait, dans le même temps, les terrains de golf continuaient à être copieusement arrosés, les yachts lavés à l’eau potable et les piscines privées remplies… L’eau est également soumise à l’accaparement par les acteurs de l’agriculture intensive, notamment via les mégabassines. Nous dénonçons ces usages injustes qui risquent de priver d’autres personnes d’un accès à l’eau.

En matière d’accès à l’eau, comme en matière de protection face aux événements climatiques extrêmes, les plus riches et les classes populaires n’ont visiblement pas les mêmes droits. Face aux chaleurs extrêmes, les premiers impacté·es sont les plus vulnérables : les personnes âgées (dont 23 000 décès ont été causés par les canicules entre 2014 et 2022), les sans-abris, les travailleur·euses (notamment du BTP), les paysan·nes qui perdent leurs récoltes, mais aussi les personnes mal logé·es.

En été, tout comme en hiver, les logements en situation de précarité énergétique ne permettent pas de vivre dignement. La Fondation Abbé Pierre alerte : « 5,2 millions de passoires thermiques qui se transforment en bouilloires énergétiques impossibles à refroidir en été ». Avec l’augmentation du nombre et de la fréquence des vagues de chaleur, la rénovation thermique des bâtiments doit être une priorité absolue pour les autorités publiques.

Des solutions connues mais ignorées par les politiques

Les pistes d’atténuation et d’adaptation aux impacts du changement climatique sont pourtant nombreuses :

  • en finir avec les énergies fossiles et faire place à des sociétés plus sobres. Cela signifie un changement de système énergétique et économique profond. Celui-ci doit passer par des mesures de réduction structurelle de la demande énergétique (réduction et priorisation juste des besoins, efficacité énergétique dont rénovation thermique des bâtiments), mais aussi par le déploiement des énergies renouvelables. En parallèle, aucune nouvelle infrastructure pétrolière ou gazière ne doit être développée, au risque de s’enfermer dans une dépendance fatale aux énergies fossiles.
  • repenser les transports, en réduisant drastiquement le trafic aérien et routier, pour développer et massifier les transports en commun et l’usage de mobilités douces.
  • adopter une meilleure répartition et un meilleur usage des terres, notamment agricoles
  • réduire drastiquement l’élevage intensif et dépasser le règne de l’agriculture intensive, au profit de l’agroécologie, plus sobre et durable.
  • repenser nos modes de consommation, en limitant les volumes de production et en réduisant l’influence de la publicité dans les imaginaires populaires.

Tout cela nécessite des moyens considérables et du courage politique, deux choses qui ne semblent pas être la priorité du gouvernement. Le 6 juillet, la Cour des comptes dressait un bilan très critique de la contribution de la dépense publique à la transition écologique. Alors que les dépenses « favorables à l’environnement » sont très largement insuffisantes – elles ont augmenté de 1 milliard d’euros entre 2021 et 2023, alors que le besoin d’investissement peut être évalué à au moins 10 milliards d’euros par an pour la seule transition climatique (chiffre issu de la note de la Cour des comtes) – , les dépenses « défavorables à l’environnement » ont explosé – passant de 10,3 à 19,6 milliards d’euros entre 2022 et 2023.