Surproduction
Communiqué de presse19 avril 2023

Fast-fashion – 10 ans après l’effondrement du Rana Plaza au Bangladesh, la mode exploite toujours ses travailleuses

Il y a dix ans, à Dacca au Bangladesh, s’effondrait le Rana Plaza, bâtiment qui hébergeait des centaines d’usines textiles. Le bilan est effarant – plus de 1200 mort·es, le double de blessé·es – et au milieu des décombres, les noms sur les étiquettes nous sont familiers : Auchan, Carrefour, H&M, Primark…

A l’occasion de cet anniversaire macabre, ActionAid France et Les Amis de la Terre France organisent aujourd’hui, mercredi 19 avril, un défilé de mode de 13h30 à 15h place Joachim du Bellay (Les Halles, Paris 1)  pour rappeler que, malgré une décennie passée, les ouvrières sont plus que jamais exploitées. La crise liée à l’épidémie de Covid-19 les a notamment d’autant plus précarisées. Avec la loi française sur le devoir de vigilance, les entreprises peuvent et doivent désormais être tenues responsables pour les atteintes aux droits humains et environnementaux liées à leurs activités.

Des vêtements au goût amer de l’exploitation

Dans l’industrie du textile, les multinationales engrangent des milliards sur le dos des ouvrier∙e∙s, qui en bout de chaîne, se voient confisquer jusqu’à leurs vies pour habiller le monde entier. Les catastrophes se suivent et se répètent mais les conditions de travail restent peu ou prou les mêmes : des salaires indignes, largement en deçà du minimum vital, des cadences intenables, des objectifs de production irréalistes, et des droits sociaux souvent inexistants, le tout exposé·e·s à des produits chimiques toxiques et des machines dangereuses. La mode n’a que faire de ses ouvrières. Car sans surprise, ce sont des femmes reléguées à ces postes subalternes, sous la responsabilité de contremaîtres, majoritairement masculins. Rendues vulnérables par leur statut de femme, par la pression des marques et l’exploitation généralisée, nombreuses rapportent un quotidien rythmé par les violences de genre à l’usine. Dans la course effrénée aux profits, les multinationales ferment les yeux.

Une fuite en avant toujours plus destructrice du secteur

Avec un bafouement toujours plus flagrant des droits humains, l’industrie de la mode semble s’enliser dans une dynamique toujours plus désastreuse pour les individus et la planète. Aux H&M et Zara qui semblaient être l’apogée d’une mode destructrice, succèdent aujourd’hui les acteurs de l’ultra fast-fashion, poussant le système à son paroxysme. Lorsque les Primark ou Shein de ce monde grignotent toujours plus de parts de marché, les enseignes de textile français s’écroulent les unes après les autres et certains pays d’Afrique étouffent sous les fumées des déchets textiles. Une fois n’est pas coutume, c’est bien la quantité qui pose problème ici; 3 milliards de vêtements mis en marché en France chaque année, soit 44 par habitant. Près de 10 fois plus que les trajectoires recommandées pour respecter l’Accord de Paris. Même s’il est urgent d’améliorer la quantité de nos vêtements c’est bien la quantité qu’il faut réduire avant tout. Aucun système ne peut être viable pour la planète et les populations dès lors qu’il est soumis à un telle injonction de production.

Une directive européenne qui doit se doter d’ambitions

En mai sera voté par le Parlement Européen le projet de directive européenne sur le devoir de vigilance des multinationales. Depuis le début des négociations, une large partie de sa substance a été vidée, laissant un boulevard aux multinationales pour continuer d’exploiter ouvrier·e·s et travailleur·se·s dans l’impunité la plus totale. Les eurodéputé·e·s peuvent maintenant choisir d’inscrire dans cette loi de véritables avancées pour les droits humains – et notamment sur les droits des femmes et environnementaux.