arton1974
Climat-ÉnergieFinance
2 juillet 2015

Plomin C : pourquoi le Crédit Agricole doit se retirer du projet de centrale à charbon prévu en Croatie ?

Alors que la conférence de Paris se rapproche à grands pas, le Crédit Agricole soutient le développement de nouvelles centrales à charbon, notamment celui de Plomin C en Croatie.

En contradiction majeure avec les impératifs climatiques, ce projet est aussi contesté par la population locale sur des critères économiques, légaux et sanitaires. Pour les Amis de la Terre, le Crédit Agricole doit immédiatement se retirer de ce projet et s’engager à mettre un terme à tous ses soutiens au charbon en signant l’Appel de Paris.

Le projet en bref

  • Plomin C est un projet de nouvelle unité pour la centrale déjà existante de Plomin. Plomin 1 et Plomin 2 (210MW) furent respectivement construites en 1969 et 2000. Plomin C est présenté comme une unité de remplacement pour Plomin 1 bien qu’elle serait plus de 4 fois plus grande que celle-ci, 500MW au lieu de 120MW, et ferait plus que doubler la capacité totale de la centrale.
  • Plomin se situe à une dizaine de kilomètres de Rabac, sur la côte en Istrie, à côté d’une zone protégée
  • L’entreprise d’électricité croate HEP a annoncé en septembre 2014 que l’appel à projet pour la construction du projet revenait à Alstom et à Marubeni, l’une des plus importante Sōgō shōsha (corporation) japonaise, tous deux connus pour leur lourd passif en matière de corruption. A noter qu’EDF était également intéressé par le projet.
  • La Croatie ne produit plus de charbon qui serait donc importé par bateau de pays producteurs comme l’Afrique du Sud, l’Indonésie.
  • Le Crédit Agricole est pour l’instant la seule banque internationale à être impliquée dans le projet évalué à 800 millions d’euros à travers un mandat de conseil auprès des entreprises.

Les risques et controverses liées au projet

Pollutions et santé

  • D’après un rapport publié par Greenpeace en avril 20131, la pollution causera 17 morts prématurées par an (soit 680 morts prématurées pendant la durée d’existence de la centrale) et 3970 jours de travail perdus.
  • En plus d’enfreindre les droits à un environnement sur de la population locale, le projet contribuerait sûrement à une pollution massive des ressources – eau, terre, air – des populations habitantes près de mines de charbon et à des violations de droits humains associées à l’extraction du charbon. En effet, le charbon qui devrait être importé, proviendrait probablement de pays comme l’Indonésie, la Colombie et l’Afrique du Sud où les violations de droits dans le secteur minier sont très répandues en addition de conflits sociaux récurrents.

Démocratie et illégalité

  • La population locale, qui subit déjà les principaux impacts de la centrale, ainsi que la majorité de la population d’Istrie, est opposée à la production d’électricité à partir de charbon. Le projet est considéré comme étant imposé par les politiques de Zagreb sans considération des impacts et des pollutions dans une région éloignée de la capitale. En mars, 94% des habitants de 5 communautés d’Istrie interrogés lors d’un référendum se sont prononcés contre la construction de la centrale de Plomin C.
  • Des mobilisations sont régulièrement organisées en Croatie contre ce projet avec le soutien d’organisations internationales comme Bankwatch, BankTrack. En France, les Amis de la Terre appellent le Crédit Agricole à se retirer immédiatement du projet.
  • Le projet ne respecte pas le plan d’aménagement aménagement local qui fut changé suite aux protestations contre la deuxième unité pour garantir que la centrale ne dépasserait pas la taille totale de 335 MW et qu’une éventuelle nouvelle unité serait alimenté au gaz et non au charbon : la consultation publique tenue en 2011 autour de l’Etude d’impact environnemental a en effet démontré que le gouvernement ne considérait sérieusement que la possibilité d’une centrale à charbon, volonté confirmée par la suite dans ses autres déclarations.
  • L’autorisation du projet par le Ministre de la construction et de l’aménagement spatial serait donc illégale fait l’objet de poursuites par les populations locales, Green Istria, Bankwatch et Zelena Akcija (les Amis de la Terre Croatie) devant les autorités d’Istrie depuis octobre 2012. Le conseil municipal d’Istrie est également en procès avec le Ministère de la construction et de l’aménagement spatial sur le même motif.

Climat et budget carbone

  • Cette seule centrale à charbon risquerait d’empêcher le pays de respecter ses objectifs climat décidés dans le cadre de l’Union européenne. En effet, la Croatie étant un petit pays, elle émettrait à elle seule une grande partie si ce n’est plus du budget carbone du pays d’ici 2050 : la Croatie peut émettre entre 1,566 et 6,264 millions de tonnes d’équivalent de CO2 par an. Or Plomin C en émettrait 2.644 millions de tonnes.
  • Dans le meilleur des cas, la Croatie ne pourrait donc développer qu’à la marge tout autre secteur émetteur comme le transport ou l’industrie.

Fiabilité économique du projet

  • Le gouvernement croate veut croire que la centrale va lui permettre de stimuler la croissance du pays bien que les analyses démontrent le risque d’effet inverse sur l’économie. Pourtant, le Dr Enco Tireli qui dirigea la construction de Plomin 2 et travailla plus de 15 ans pour HEP, a trouvé que le projet ne serait pas viable économiquement notamment en raison de la nécessité d’acheter des crédits carbone via le marché européen ETS. Aucun promoteur du projet n’a répondu aux commentaires à ce sujet.
  • Le risque est que le manque de revenu de la centrale soit couvert par des hausses de tarif de l’électricité et donc par la population.

Dépendance énergétique

  • Le pays ayant épuisé ses propres ressources de charbon, le projet reposerait sur l’importation du charbon, et ne permettrait donc pas de réduire la dépendance énergétique de la Croatie, contrairement aux dires d’HEP et du Ministre de l’économie croate.
  • Plomin C réduirait l’importation d’électricité qui s’élevait à 24.06 PJ en 2010, il augmenterait celle de charbon [[En 2010, la Croatie importait 29.48 PJ de charbon pour produire de l’électricité et pour usage industriel.]]
    Le projet est présenté comme une solution à la dépendance énergétique du pays vis-à-vis de la Russie d’où est importé du gaz. Pourtant, la Croatie ne produisait déjà plus de charbon lorsque Plomin 2 a été construite en 2000.

Source :
Bankwatch : http://bankwatch.org/our-work/projects/plomin-coal-power-plant-croatia

BankTrack :