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Climat-ÉnergieFinance
30 avril 2019

Rothschild & co appelé à ne pas soutenir la mine de Carmichael d’Adani en Australie

« Keep coal in the ground », ce slogan militant pour le climat est devenu ces dernières années une position partagée au niveau mondial, fondée non pas sur des croyances mais sur des faits.

S’il est encore temps de prévenir l’emballement du dérèglement climatique et ses conséquences sociales et économiques désastreuses, plusieurs rapports scientifiques ont clairement indiqué que cela nécessiterait un arrêt immédiat de la construction de nouvelles mines et centrales à charbon ainsi qu’une sortie progressive mais rapide des infrastructures de charbon existantes.

Cependant, à un moment où la science ne pourrait pas être plus claire sur la nécessité de réduire les émissions mondiales de carbone et de renoncer à exploiter les réserves mondiales de charbon afin de limiter le réchauffement du globe bien sous le seuil de 2°C, une entreprise nommée Adani s’accroche désespérément à son projet de construire l’une des plus grandes mines de charbon du monde en Australie.

Le projet émettrait 4,6 milliards de tonnes de CO2 : soit 8 années d’émissions de gaz à effet de serre de l’Australie

En plus d’être une bombe climatique massive, Carmichael menace les droits des propriétaires traditionnels, les peuples Wangan et Jagalingou, qui n’acceptent pas la mine, ainsi que les divers écosystèmes de la Grande Barrière de corail.

En effet, le projet consiste également en une ligne ferroviaire d’environ 200 km de long qui transporterait le charbon jusqu’à un terminal d’exportation sur la Grande Barrière de corail. Le dragage et le trafic maritime qui en résulteraient menacent de causer des dommages irréversibles à l’un des écosystèmes les plus riches en biodiversité au monde, un trésor mondial qui est protégé en tant que site du patrimoine mondial.

Pour stopper le projet, des ONG et militants du monde entier ont appelé les institutions financières à prendre position contre cette mine destructrice. Et cela a fonctionné : quarante-sept banques d’investissement et assureurs internationaux, dont BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale, AXA et SCOR en France, ont exclu leur soutien à tout ou partie du projet. En raison de son incapacité à obtenir du financement bancaire direct, Adani a annoncé en novembre dernier son intention d’autofinancer la totalité de la mine et de la voie ferrée Carmichael, un projet de 1,5 G$ US.

Pour réunir une partie du capital nécessaire, Adani a l’intention de vendre une participation dans le terminal d’exportation de charbon Abbot Point. Et c’est la banque franco-anglaise Rothschild & Co qui soutient l’opération à travers un mandat de conseil à Adani. Ainsi, aujourd’hui, 16 organisations françaises et australiennes envoient une lettre ouverte à Rothschild & Co, demandant à la banque de se retirer publiquement de son soutien à Adani.

La lettre, coordonnée par les Amis de la Terre France et l’ONG australienne Market Forces, attire également l’attention sur le rôle joué par Rothschild & co dans la transaction d’actifs charbon dont actuellement la vente des centrales à charbon d’Uniper en France. Ce type de soutien devient de plus en plus controversé car les ventes entraînent souvent des retards dans la fermeture des usines et jouent contre une décarbonisation socialement équitable de l’économie.

En 2017, la responsable de la RSE de BNP Paribas a déclaré dans un entretien accordé à Novethic que la banque ne soutiendrait pas la vente ou l’achat de centrales au charbon car “L’objectif est bien que ces centrales soient fermées et non revendues à des entreprises moins-disantes sur le plan environnemental”. Cette position est partagée par d’autres grandes banques françaises qui ont fortement limité leur capacité à exercer un mandat de conseil pour la vente et l’achat d’actifs charbon.

Jusqu’à présent, Rothschild & co a bénéficié de sa faible notoriété chez les non-initiés. Mais ce temps est révolu, et Rothschild & co peut s’attendre à une surveillance accrue de la part des ONG et de la société civile si elle ne s’attelle pas à sa responsabilité en matière climatique.