Une centrale à charbon. Au loin, on voit également une éolienne.
Volker Hartmann/Getty Images
Climat-ÉnergieFinance
14 novembre 2019

Sortie du charbon : la finance française en ordre de marche ?

BankTrack et la campagne Unfriend Coal dressent dans une note l’écart entre les politiques des acteurs financiers français dans le secteur du charbon et ce qu’il leur faudrait faire pour respecter l’engagement de place du 2 juillet de publier d’ici mi 2020 des plans de sortie du secteur.

En partenariat avec les Amis de la Terre France, ils appellent les acteurs français à se saisir de l’opportunité des événements à venir pour annoncer l’exclusion immédiate des 417 entreprises qui développent de nouveaux projets charbon et une stratégie permettant au plus tard une sortie du charbon d’ici 2030 dans les pays de l’UE et de l’OCDE et d’ici 2040 ailleurs.

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Une centrale à charbon. Au loin, on voit également une éolienne.
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Sortie du charbon : la finance française en ordre de marche ?

Le 2 juillet, et sous pression du Ministère de l’Economie et des Finances et des ONG, la place financière de Paris, à travers les fédérations professionnelles a annoncé que, d’ici à mi-2020, ses membres, banques, assureurs et investisseurs, doivent définir « un calendrier de sortie globale du financement des activités charbon ». 1

Lucie Pinson coordinatrice de la campagne Unfriend Coal et référente de la campagne finance privée des Amis de la Terre France commente : “S’il est suivi d’effets, cet engagement fera figure d’exemple sur la scène internationale où il pourrait provoquer un puissant effet d’entraînement. Mais les risques de greenwashing sont énormes : il est non contraignant donc il faut s’attendre à ce que beaucoup d’acteurs rechignent à le mettre en place ou à adopter les mesures indispensables pour sortir du charbon dans les temps impartis pour limiter le réchauffement à 1,5°C maximum. C’est notamment le cas de BNP Paribas et AXA qui suivent une direction radicalement opposée en continuant de financer ou d’assurer des entreprises qui développent de nouveaux projets charbon”.

D’après de nouvelles données financières, BNP Paribas est le plus gros financeur français des entreprises qui développent de nouvelles centrales à charbon, avec pas moins de 2,2 milliards de financements accordés à ces entreprises rien qu’en 2019. 2 En Indonésie, où le charbon cause la mort prématurée de milliers de personnes tous les ans, BNP Paribas a accordé entre janvier et septembre 2019 pas moins de 211 millions d’euros de financements à PLN Persero, une entreprise qui produit déjà 62% de son électricité à partir de charbon mais prévoit plus de 10 GW de nouvelle capacité.

Quant à AXA, il n’assure plus directement de nouveaux projets charbon mais peut toujours délivrer des couvertures d’assurance, y compris dommages, aux expansionnistes du secteur du charbon. D’après des sources issues du secteur de l’assurance, AXA est notamment un des assureurs de Adani Mining, une filiale australienne du conglomérat indien Adani qui prévoit la gigantesque et très controversée mine de charbon Carmichael en Australie. Ce projet pourrait ouvrir la deuxième bombe carbone au monde après la Chine3 et menace l’écosystème fragile de la Grande Barrière de corail.

Yann Louvel, chargé de campagne climat à BankTrack, précise : “Respecter l’engagement du 2 juillet impliquerait a minima de refuser de financer ou d’assurer les 417 entreprises qui prévoient le développement de nouvelles mines, centrales et infrastructures charbon et de conditionner tous services financiers à l’adoption par les entreprises d’un plan de fermeture de leurs actifs charbon existants, au plus tard d’ici 2030 dans les pays de l’UE et de l’OCDE et d’ici 2040 ailleurs. Crédit Agricole est sur la bonne voie même si ses engagements de juin se doivent encore d’être appliqués. BNP Paribas, à l’inverse, n’a toujours pas revu sa politique concernant ses clients corporate depuis 2015, il y a près de 4 ans.”

Quant à Société générale et Natixis, elles ont certes déjà revu leurs politiques charbon à la hausse mais celles-ci ne permettent toujours pas une sortie du charbon dans les temps impartis par la science climatique. Les Amis de la Terre France appellent les banques et assureurs et investisseurs français à se saisir de l’opportunité du Climate Finance Day et de la COP25 pour annoncer une politique charbon qui réponde vraiment aux objectifs annoncés le 2 juillet.

Notes
1

Voir le communiqué de l’ASF-Association Française des Sociétés Financières, AFG-Association Française de la Gestion Financière, FBF-Fédération Bancaire Française, FFA-Fédération Française de l’Assurance, France Invest-Association des Investisseurs pour la croissance, Paris EUROPLACE et Finance for Tomorrow)

2

Les données financières proviennent des recherches de l’agence néerlandaise Profundo. L’intégralité des financements et investissements internationaux aux 258 entreprises qui développent de nouveaux projets charbon sera publié en décembre 2019.

3

Publication de Greenpeace