2 janvier 2024

Aux Amis de la Terre, 2023, c’était…

Répression policière inédite à Sainte-Soline, meurtre de Nahel, vote de la loi immigration... 2023 a été le théâtre de nombreux revers dans notre combat pour l’environnement et les droits humains. Mais 2023 a aussi vu émerger des lueurs d’espoir, un regain d’énergie militante et surtout, des victoires ! Rétrospective.

Meilleurs ennemis de Total

Après un coup dur en février suite à la décision du tribunal judiciaire de Paris, la bataille judiciaire contre Total a repris en juin. Aux côtés de 26 personnes affectées par le méga-projet pétrolier de Total en Ouganda et en Tanzanie, du défenseur des droits humains Maxwell Atuhura et de quatre associations ougandaises et françaises (AFIEGO, NAPE/Amis de la Terre Ouganda, Survie et TASHA Research Institute), nous avons assigné la major en justice pour demander réparation pour les violations des droits humains commises par Total dans le cadre de son double-projet Tilenga et EACOP.

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Pour documenter les violations des droits humains et les dommages environnementaux liés à Tilenga et EACOP, nous avons développé, en partenariat avec le collectif Mémoire Vive, une carte-enquête interactive, réalisée à partir d’images satellites et d’enquêtes inédites racontées par Guillaume Meurice. Parce que pour lutter il faut d’abord s’informer, cette carte-enquête est un précieux outil de veille citoyenne pour sensibiliser aux ravages des projets opérés par Total.

Alors que la situation sécuritaire au Mozambique est toujours dramatique, presque trois ans après l’attaque de Palma qui avait causé la mort d’au moins 1200 civils, Total a annoncé vouloir relancer son projet gazier Mozambique LNG. Pour faire barrage à la relance de ce projet destructeur, les Amis de la Terre ont organisé la venue de représentant·es des Amis de la Terre Mozambique, pour dénoncer les défaillances de Total face aux violations des droits humains liées à son projet. À la suite de cela, les Amis de la Terre ont coordonné une lettre ouverte signée par 124 organisations du monde entier, pour demander aux soutiens financiers de Mozambique LNG de se retirer du projet.

Vent debout contre le financement des énergies fossiles

En février, avec Notre Affaire à Tous et Oxfam France, nous avons assigné BNP Paribas en justice, en raison de ses soutiens financiers à l’industrie des énergies fossiles. Avec L’Affaire BNP, pour la première fois, une banque devra passer devant le juge pour répondre de sa contribution au réchauffement climatique !

La science est unanime concernant les liens directs entre les énergies fossiles et l’emballement climatique. Pour rappeler l’urgence à sortir des énergies fossiles, nous nous sommes donc invité·es à l’Assemblée générale de BNP, accompagné·es par plusieurs représentant·es de la communauté scientifique membres du collectif Scientifiques en Rébellion. L’objectif ? Demander des comptes au Conseil d’Administration de BNP, premier financeur mondial de Total en 2022.

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Parce que le financement des banques privées à l’industrie fossile ne concerne malheureusement pas que BNP Paribas, nous faisons campagne depuis des années pour obtenir des banques françaises qu’elles retirent définitivement leurs soutiens financiers à cette industrie mortifère. Et preuve que la détermination porte ses fruits, nous avons appris en mars le retrait de Société Générale de Rio Grande LNG, projet gazier très controversé situé aux États-Unis. Cette nouvelle est une victoire encourageante et porteuse d’espoir pour nos combats, puisque les Amis de la Terre étaient mobilisé·es depuis 2017 contre ce méga-projet texan de terminal d’exportation de gaz fossile.

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Détricoter la surproduction dans la mode

10 ans après le drame du Rana Plaza, la nouvelle campagne des Amis de la Terre contre la surproduction dans le secteur textile a été lancée avec un décryptage publié dans le contexte des soldes d’hiver. Quelques mois plus tard a été publiée une analyse du modèle de Shein, le géant chinois de l’ultra fast-fashion : un travail d’enquête minutieux et précieux dans la dénonciation de la mode du « tout jetable » et pour une mode vraiment durable et respectueuse de ses travailleur·ses.

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Aux Amis de la Terre, la fin d’année a un goût amer, car elle résonne avec le Black Friday, point d’orgue de la surproduction, et donc de la surconsommation. Parce que nous sommes convaincu·es que pour moins consommer, il faut d’abord moins produire, nous avons, aux côtés de sept autres associations, lancé une plateforme d’interpellation pour enjoindre Bruno Le Maire à impulser une loi contre la fast-fashion. Il est encore temps pour vous de rejoindre le mouvement, ça se passe juste ici ! 👇

Pas de transition écologique sans agroécologie !

En 2020, la France ne comptait plus que 390 000 fermes, contre 600 000 fermes vingt ans plus tôt. Les exploitations agricoles se font de moins en moins nombreuses, mais elles s’étendent sur des surfaces de plus en plus vastes. Et qui en profite ? Les multinationales et les investisseurs, qui s’accaparent les terres agricoles. Pour documenter et dénoncer ce phénomène qui fait des ravages en Roumanie par exemple, où 40% des terres sont détenus par des investisseurs, nous avons publié un décryptage formulant une recommandation de plafonner à 300 hectares la surface qu’une seule et même personne peut détenir.

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La campagne agriculture des Amis de la Terre étant également très active dans la lutte contre les engrais de synthèse, la fin d’année a été pour nous l’occasion de mettre la lumière sur les liens étroits entre l’industrie des engrais et celle des énergies fossiles. La transition agroécologique devra passer par la sortie de l’agriculture intensive, de l’élevage industriel et des engrais de synthèse, pour faire place au développement des légumineuses et à un soutien massif de la puissance publique à l’agriculture biologique.

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Désobéir pour ne pas subir

Parce que Total le vaut bien, nous avons co-organisé une action de masse qui a fortement perturbé son Assemblée générale annuelle : 700 activistes du mouvement climat se sont mobilisé·es pour dire non aux énergies fossiles.

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Début novembre, les Amis de la Terre et sept autre associations ont symboliquement fermé le Ministère de la Transition écologique pour dénoncer son inaction sur la question climatique et dénoncer la dangereuse politique énergétique portée par le gouvernement. En baptisant pour l’occasion le Ministère « Ministère de la Trahison écologique », nos associations ont rappelé l’urgence pour la France de sortir des énergies fossiles et de miser sur la sobriété, l’efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables.

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En 2023, les groupes locaux des Amis de la Terre ont également mené, dans toute la France, diverses actions non-violentes d’affichage sauvage, visant le géant financier BNP Paribas mais aussi les grands noms de la fast-fashion. Loin de vouloir s’arrêter là, ils ont agi localement sur différentes luttes, que ce soit contre le glyphosate en Côte d’Or, contre les panneaux lumineux allumés la nuit à Metz, ou encore avec la mobilisation contre des projets urbains à Paris et la lutte contre le nucléaire par les Amis de la Terre Midi-Pyrénées.

La justice sociale, condition sine qua non de la transition

Le 27 juin, la mort de Nahel a provoqué un embrasement et une colère populaire, qui se sont heurtés à une répression policière féroce. Le racisme institutionnel qui infuse les forces de l’ordre françaises agit comme un poison qui ne fait que tracer le chemin vers l’accession de l’extrême-droite au pouvoir. Des sociétés justes et solidaires devront nécessairement passer par une prise en compte par les pouvoirs publics des besoins et réalités des quartiers populaires ! C’est pourquoi les Amis de la Terre ont signé un appel commun appelant à se mobiliser contre l’injustice.

La répression policière avait également fait rage le 25 mars à Sainte-Soline, lors de la manifestation contre les mégabassines, symboles de l’accaparement des ressources naturelles par l’agro-industrie. La Ligue des Droits de l’Homme avait alors mis en cause les forces de l’ordre, pour rétablir la vérité sur la violence inouïe dont elles avaient fait preuve à l’encontre des manifestant·es. Suite à la dissolution des Soulèvements de la Terre, les Amis de la Terre avaient fait une intervention volontaire aux côtés d’autres associations, en soutien au recours déposé par les Soulèvements de la Terre. Cette action en justice s’est soldée par une victoire et un grave revers pour la politique liberticide et répressive du gouvernement : en novembre, le Conseil d’État a annulé la dissolution de ce mouvement, considérant qu’il s’agissait dune atteinte grave à la liberté d’association et qu’aucune provocation à la violence contre les personnes ne pouvait être imputée aux Soulèvements de la Terre.

Dans le cadre de l’Alliance écologique et sociale, notre fédération s’est également positionnée en soutien à la mobilisation interprofessionnelle et citoyenne contre la réforme des retraites, réforme profondément antisociale et qui ignore les conséquences du changement climatique.

Enfin, nous condamnons fermement la loi immigration votée le 19 décembre. Cette loi bafoue les droits les plus fondamentaux et les principes de solidarité et d’humanité, en reprenant les idées racistes et xénophobes de l’extrême-droite.

Parce qu’il ne peut y avoir d’écologie sans respect des droits de toutes et tous, nous resterons mobilisé·es en 2024 pour lutter contre toutes les injustices !

Pour que 2024 soit synonyme d’espoir et de victoires, nous avons besoin de vous.