AG de Total le 26 mai 2023 à Paris. Crédit : Kenia Sadoun
AG de Total le 26 mai 2023 à Paris. Crédit : Kenia Sadoun
Multinationales
26 mai 2023

AG de Total perturbée : 700 activistes disent stop aux énergies fossiles

On les avait prévenus, on l’a fait. Un an après le blocage de l’Assemblée générale de Total par 250 activistes le 25 mai 2022, le mouvement climat est aujourd’hui passé à la vitesse supérieure en réunissant 700 activistes pour dire non aux énergies fossiles.

Alors qu’aujourd’hui, les actionnaires de Total devaient se réunir pour célébrer les superprofits du groupe, l’Assemblée générale a été fortement perturbée par la présence d’une coalition d’activistes. L’année dernière, les activistes du mouvement climat étaient déjà 250 à bloquer l’Assemblée générale du géant du pétrole et du gaz, contraignant Total à annuler son Assemblée générale en physique. Cette année, les associations co-organisatrices sont passées à l’étape supérieure et ont réuni 700 activistes, pour dire non à la stratégie délétère de Total qui s’obstine à voter des plans de développement de nouveaux projets pétroliers et gaziers, au mépris de l’urgence climatique et des communautés affectées par ces projets aux quatre coins du globe.

Conformément à l’avertissement publié il y a un mois, les activistes du mouvement climat étaient prêt·es ce matin aux aurores pour bloquer les différents points d’entrée de la salle Pleyel à Paris, où devait se tenir l’Assemblée générale annuelle de Total. Co-organisée par Alternatiba Paris, les Amis de la Terre France, Attac, et avec le soutien de Greenpeace France, 350.org et Scientifiques en Rébellion, cette action de masse a été plus que jamais l’occasion de dénoncer la stratégie climaticide de Total.

Une violence inouïe de la répression policière

Les activistes étaient sur place dès à 6h du matin pour s’enchaîner les un·es aux autres devant les portes d’entrée de la salle Pleyel, mais les forces de l’ordre les ont accueilli·es à coups de gaz lacrymogène, nasses, grenades et matraquages arbitraires. La présence policière disproportionnée qui a été déployée ce matin et la violente répression qui a été observée ont empêché le blocage d’être effectif, et montrent une fois de plus que l’État protège les intérêts de la multinationale et des puissants, au détriment de l’intérêt général et de la transition. Malgré les violences, les tentatives d’intimidation et les brutalisations par les forces de l’ordre, les activistes sont resté·es déterminé·es et ont montré que le cynisme de Total n’a plus sa place à l’heure où la planète subit des sécheresses sans précédent. Tenir de la sorte l’AG de l’une des entreprises les plus polluantes de la planète, au prix d’une violence inouïe et d’activistes blessé·es alors que l’action est non-violente, est l’aveu du fiasco de la stratégie destructrice de Total. Nous dénonçons la protection du mastodon pétro-gazier par le gouvernement, et exigeons du gouvernement d’Emmanuel Macron qu’il mette enfin en place un encadrement strict des activités du groupe, pour préserver l’environnement et les droits des communautés affectées.

Nous l’avons montré une nouvelle fois aujourd’hui

Total et son monde ne pourront plus se réunir en toute impunité dans leurs tours dorées pour célébrer les profits exubérants de la multinationale et piétiner nos chances de maintenir les conditions de vie humaine sur Terre.

Total, ennemi n°1 du climat

Malgré le greenwashing de la multinationale, la société civile n’est pas dupe. Rappelons-le, Total est le premier pollueur de France. Du haut de ses 36 milliards d’euros de bénéfice – soit plus du double par rapport à 2021, et dont 9,4 milliards d’euros sont directement allés dans les poches des actionnaires – pour l’année 2022 et alors que l’été qui s’annonce prévoit des températures infernales, le géant du pétrole et du gaz poursuit sa fuite en avant dans le développement de projets d’énergies fossiles.

En effet, le greenwashing de Total est un leurre. Le groupe, qui était la major internationale ayant approuvé le plus de nouveaux projets pétroliers et gaziers en 20221, prévoit d’augmenter sa production de pétrole et de gaz jusqu’en 2030, voire au-delà. En Ouganda et en Tanzanie avec EACOP (le projet d’oléoduc chauffé le plus long du monde, qui mettrait en danger 35 cours d’eau et 2 lacs, et affecteraient plus de 118 000 personnes en les privant de leurs moyens de subsistance), au Mozambique avec le méga-projet gazier Mozambique LNG, qui pourrait être relancé malgré un contexte humanitaire dramatique, en Argentine avec l’exploitation de gaz de schiste, ou encore au Sénégal avec des forages offshore… Total prévoit de développer de nouvelles bombes climatiques aux quatre coins du monde, et notamment en Afrique, où c’est l’entreprise fossile qui mène la stratégie d’expansion la plus agressive.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les énergies fossiles représentent encore 91% de la production de Total et 73% de ses investissements. Ces projets contribueront à émettre environ 2,3 gigatonnes de CO2, soit l’équivalent de ce que la France émet en 6 ans !2

Un plan climat qui n’a de climat que le nom

Alors que l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et les rapports du GIEC s’accordent sur l’impératif de ne plus développer aucun projet fossile (pétrole, charbon et gaz) pour espérer rester sous la barre des 1,5°C de réchauffement, le « plan climat » du groupe ne prévoit ni l’arrêt de ses investissements dans les pétrole et gaz, ni un plan de sortie des énergies fossiles. Au contraire, ce plan n’est qu’une stratégie d’expansion des énergies fossiles qui mise sur des fausses solutions comme la capture et compensation carbone, technologies qui ne sont rien de moins que de la poudre aux yeux dans la course contre le réchauffement climatique. Pire, Total a appelé ses actionnaires à voter contre une résolution consultative déposée par 17 actionnaires et qui demande à Total de se fixer des objectifs ambitieux de baisse de ses émissions de gaz à effet de serre, en cohérence avec l’Accord de Paris3. L’argument avancé par Total? « La multinationale ne serait pas responsable des émissions de gaz à effet de serre causées par l’utilisation des énergies qu’elle produit »… Il est intolérable d’entendre encore aujourd’hui de telles énormités4, lorsque l’on sait que cela fait des décennies que la major du pétrole et du gaz exploite les ressources naturelles et est un des principaux responsables du chaos climatique et du dépassement des limites planétaires. Pourtant, dès les années 1970, Total était au courant des conséquences dévastatrices de ses activités pour l’environnement et le climat5. Malgré cela, le groupe a alimenté pendant des décennies la fabrique du doute et le climatoscepticisme, afin que les activités et profits de la major ne soient pas menacés.

La sortie des énergies fossiles, sinon rien

Nos revendications sont claires et parfaitement alignées avec le consensus scientifique6. Total doit s’engager immédiatement et concrètement sur la fin de tout nouveau projet d’énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz). La multinationale doit également stopper ses projets d’énergies fossiles en cours, car ils sont autant de bombes climatiques qui nous éloignent de l’objectif de l’Accord de Paris et condamnent notre avenir à toutes et tous.

Lorette Philippot

« Les bombes climatiques que Total est en train d’amorcer aux quatre coins du monde ne doivent pas voir le jour, car chacune d’entre elles nous pousse vers un monde plus invivable. C’est le cas d’EACOP et Tilenga, mais aussi de Mozambique LNG. »

Lorette Philippot
Chargée de campagne finance privée aux Amis de la Terre

Elle poursuit : « Cela implique également que les acteurs financiers complices des majors comme Total, et au premier rang desquels BNP Paribas et Crédit Agricole, ferment les vannes de leurs soutiens toxiques. »

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